theatre-contemporain.net artcena.fr

Accueil de « Une chambre en Inde »

Une chambre en Inde

Ariane Mnouchkine ( Mise en scène )


: avec Anne-Lise Galavielle, scénographe en charge du hall d’accueil et icônographie

« il y a bel et bien un chemin y compris depuis l’idée initiale qui peut évoluer. Certaines surprises peuvent aussi survenir. »

Entretien réalisé à l'occasion du dossier Pièce (dé)montée, propos recueillis par Cécile Roy-Fleury, juillet 2016

Pouvez-vous nous parler de la préparation du nouveau hall d’accueil ?


Ariane Mnouchkine a dès le départ souhaité la présence de tableaux lumineux. A donc commencé pour moi une période d’imprégnation nécessaire à la découverte et compréhension de l’esthétique indienne. J’ai effectué de nombreuses recherches afin de collecter des images auxquelles se sont ajoutées celles faites en Inde par l’équipe. J’ai eu ainsi la chance de m’immerger dans le Mahabharata et le Ramayana. Des ateliers lumineux ont pu être ensuite lancés sous la responsabilité de candidats spécialistes. Il fallait rendre cette confection accessible au plus grand nombre, les comédiens ayant ici été fortement sollicités. Les consignes devaient donc être très précises afin de faciliter la transmission. Nous avons d’abord dû faire face à certaines difficultés qui ont peu à peu été surmontées grâce à des ajustements techniques ou graphiques. J’ai à cet égard simplifié et clarifié les dessins. Ces derniers sont réalisés à l’échelle 1 afin d’être transmis en noir et blanc au chantier soudure. Une fois sortis de l’imprimante et scotchés entre eux, les dessins forment un ensemble de 2,3 x 3 mètres. Des fils de fer sont ensuite assemblés en fonction du modèle puis soudés. S’en suit un chantier électricité consacré aux ampoules LED. Le dessin est cette fois proposé en couleurs afin de permettre une meilleure compréhension, la manière dont l’ampoule étant installée ayant une grande incidence sur la lecture finale. À ce stade, les ampoules sont encore blanches. Il faudra un nouveau passage par l’atelier électricité et d’ultimes vérifications pour que la peinture de chaque ampoule puisse être envisagée. Les LED sont alors éclairées ce qui explique le port de lunettes de soleil. Nous avons fini par maîtriser complètement le processus !


Les tableaux cheminent donc d’atelier en atelier.


Oui, il y a bel et bien un chemin y compris depuis l’idée initiale qui peut évoluer. Certaines surprises peuvent aussi survenir.


Quelles ont été ces surprises ?


La plus grande a peut-être été la découverte d’une peinture banche qui une fois sur les LED a permis de diffuser la lumière. Les ampoules pouvaient ainsi être regardées de face ce qui n’était pas le cas au début en raison de leur forte luminosité. Nous avions alors décidé de placer les tableaux en hauteur. Ce changement en lien avec la matérialité de la peinture a ouvert une porte : j’ai proposé que les murs ne soient pas tous peints jusqu’en haut de manière à suggérer une cour. Ariane souhaitait que l’on se trouve dans un restaurant de Pondichéry relié à un Palace où logeraient les personnages de la pièce. Or les restaurants indiens se prolongent souvent en extérieur. On y trouve justement des cours dans lesquelles de grands arbres poussent. Le murs seront donc bas, des tissus risquant même de recouvrir la charpente du plafond. Les formes lumineuses flotteront dans un ciel de nuit. L’espace dans lequel on entre deviendra celui du dehors, d’où la présence de la végétation. J’ai proposé que des extraits du Mahabharata en tamoul et en hindi puissent être retranscrits sur les murs. D’autres seront également en sanskrit, langue originelle du Mahabharata et même en tibétain puisqu’Ariane a souhaité que l’on puisse lire des phrases du Dalaï-Lama. D’autres auront pour auteur Gandhi ou seront extraites de textes philosophiques très anciens (les Upanisads) ou d’un célèbre texte classique tamul, le « Tiroukkourral ».


Que ressentez-vous lorsque vous devez recouvrir les murs en vue d’un nouveau spectacle ?


Cela a été très dur lors de la création de Macbeth quand bien même je n’avais pas réalisé les précédentes peintures. Le jour dédié au recouvrement, nombreux sont ceux qui manifestent leur tristesse puis une nouvelle page blanche apparaît, ce dont on se réjouit tous. La fresque de Macbeth a été recouverte uniformément de blanc temporaire sans pigment. Les nouvelles peintures ne sont pas définitives.


Êtes-vous peintre ?


On me désigne de cette façon mais en réalité, je suis scénographe. J’ai été formée à l’Ecole Nationale Supérieure des Arts Décoratifs. Il m’arrive quelquefois de peindre à l’Odéon ou à l’Opéra mais je ne me considère pas comme peintre. Le travail en groupe est constitutif de ma pratique. L’échange est très porteur.


Cette dimension scénographique est importante pour l’aménagement de ce seuil qu’est hall d’accueil.


Oui, je mets en place un décor pour un public. S’ajoute à cela une autre de mes spécificités puisque je pratique par ailleurs la muséographie. Mon travail comporte donc un aspect didactique. J’ai par exemple commencé au début de ma recherche à résumer en dessins les grandes étapes du Mahabharata que je venais moi-même de découvrir. Il me semble important de préparer et faciliter la compréhension du spectacle à venir. Pour Macbeth, on avait à cet égard prévu de courtes notices explicatives consultables en lien avec la peinture. Ici, le spectateur retrouvera sur scène certains tableaux lumineux présents dans le hall.


Propos recueillis par Cécile Roy-Fleury, juillet 2016

imprimer en PDF - Télécharger en PDF

Ces fonctionnalités sont réservées aux abonnés
Déjà abonné, Je me connecte Voir un exemple Je m'abonne

Ces documents sont à votre disposition pour un usage privé.
Si vous souhaitez utiliser des contenus, vous devez prendre contact avec la structure ou l'auteur qui a mis à disposition le document pour en vérifier les conditions d'utilisation.