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Jeanne au bûcher

Roméo Castellucci ( Mise en scène ) , Arthur Honegger ( Musique ) , Paul Claudel ( Livret ) , Kazushi Ono ( Direction musicale )


: Notes de mise en scène 1/3

par Roméo Castellucci

Jeanne d’Arc au bûcher, oratorio dramatique d’Arthur Honegger sur un livret de Paul Claudel, s’inspire des actes du procès pour esquisser un portrait allégorique de Jeanne la Pucelle.


Comment avez-vous abordé le personnage de Jeanne d’Arc?


Jeanne d’Arc est un personnage qu’il faut aborder en prenant de la distance, un personnage pour lequel une bataille s’impose, celle qui consiste à l’a ranchir du poids de l’histoire et de la propagande. Jeanne d’Arc est une sainte catholique condamnée pour hérésie, érigée en symbole du martyre glori é ; c’est une héroïne pour les républicains et les royalistes, une icône pour le régime de Vichy et les mouvements de résistance ; elle fait gure d’emblème pour les Su ragettes et la défense des droits démocratiques mais les partis nationalistes et les xénophobes s’en sont aussi emparés pour en faire leur nouveau porte-drapeau. Elle a été tour à tour assimilée à des gures bibliques telles qu’Esther ou Judith, à une prostituée naude, à l’incarnation sur terre de la pureté spirituelle, à une amazone, à une sorcière. Dès lors, il s’agit principalement de s’insurger contre les symboles, contre l’hagiographie, contre la commémoration nostalgique de l’histoire et contre la célébration de l’héroïne céleste.
Cette Jeanne d’Arc n’est ni la sainte, ni la victime expiatoire de la « raison politique ». Il s’agit de couper radicalement avec son image, avec les strates idéologiques qui y ont sédimenté. Il s’agit d’enterrer les oripeaux des symboles en les considérant tout au plus comme des épaves inhumées.


Cette mise en scène se présente alors comme une opération qui consiste à dépouiller quasi littéralement le personnage de Jeanne d’Arc de ses couches de peau successives pour pouvoir saisir l’être humain dans sa nudité. C’est une allusion à la fouille stratigraphique et à l’exhumation archéologique. C’est une façon de ramener ce personnage à la réalité, avec son pouvoir fracassant d’extraction d’un élément vivant et parlant. Il ne s’agit pas de se demander ce que Jeanne d’Arc signi e pour nous aujourd’hui mais ce que nous, nous signi ons pour elle. Jeanne devient le miroir qui renvoie au spectateur que je suis mon propre regard pour que je devienne le témoin oculaire de ma propre présence.

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