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Jeanne au bûcher

Roméo Castellucci ( Mise en scène ) , Arthur Honegger ( Musique ) , Paul Claudel ( Livret ) , Kazushi Ono ( Direction musicale )


: Notes de mise en scène 3/3

par Roméo Castellucci

Dans le livret de Claudel, la scène du bûcher constitue le point d’orgue dramatique à partir duquel la vie de Jeanne se déroule à rebours. Dans votre mise en scène, comment se présente ce voyage à rebours ?


Il m’a fallu faire tomber Jeanne d’Arc de son piédestal et introduire un personnage médian, un être humain « sans contenu ». La Pucelle fait irruption telle la foudre qui s’abat sur une personne quelconque et vient perturber un aperçu de quotidienneté. Cette nouvelle présence, qui vit maintenant en un lieu inapproprié, devient l’enveloppe qui abrite les voix que nous écoutons, une gure prismatique dans laquelle se réfractent les strates de cette histoire.
Il est question d’invasion et de possession. C’est comme si Jeanne devenait à son tour une voix. Dans un certain sens, on pourrait dire que sur scène il n’y a personne à part les voix. La dimension acousmatique et la spatialisation du son sont essentielles. Cet espace de fiction fait s’écrouler toute référence, met entre parenthèses le personnage de Jeanne pour en proposer une nouvelle représentation sous un autre angle, très terre à terre, dans le but de mettre au jour un noyau humain dans la niche laissée vacante par le symbole.
Il s’agit de mettre une chose dans une autre pour percevoir le sens de l’erreur fatale : c’est un piège qui écarte la voie de l’illustratif. Nous sommes en présence d’un milieu qui « ne correspond pas » et ici les éléments festifs, ironiques et caricaturaux se drapent d’obscurité. Ce détachement permet de changer la clé de lecture de chaque objet. Il s’agit de jouer un double jeu en admettant en toute conscience l’élément étranger, en érigeant une structure complexe avec laquelle transiger avant de l’abattre. Son approximation calculée et son caractère indéterminé créent un champ de liberté pour le spectateur, une sorte de porte laissée ouverte.


Jeanne entendait des voix, nous entendons la voix – loin, très loin – de Jeanne.

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