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Algérie 54-62

+ d'infos sur le texte de Jean Magnan
mise en scène Robert Cantarella

: A la ligne

Ce qui m’a le plus surpris à la découverte du texte : une contradiction entre la franchise du titre (le nom du pays, les dates, pas de rhétorique, pas de poétique), et d’autre part un texte qui refuse sans cesse les frontalités qui auraient pu faire dire quelque chose aux événements. Cet écart, cet irrésolu, est resté un mouvement de désir depuis que j’ai lu pour la première fois Algérie 54-62 de Jean Magnan.
La guerre d’Algérie a mis du temps à s’appeler de son nom ? Longtemps les événements ont permis de disséminer (de vaporiser en plusieurs sites de responsabilité) le mot de guerre. Le nom du pays et les dates sur la couverture font penser à un incipit mortuaire. La guerre est le corps qui gît dans le livre, ou peut-être le corps du pays de naissance pour Jean Magnan, ou encore la tombe faite en mots de ceux qui sont morts pour ça.
Le théâtre c’est faire parler des corps. Jean Magnan aime, me semble-t-il,cette transfusion. Il aime le théâtre et ses trafics.
Il aime aussi le théâtre de Marlow et son époque irrévérencieuse envers les catégories. Il aime aussi Godard, son film “ Passion ”.
Montage du monde, mon amour.
L’Algérie telle qu’il la parle dans ce texte est un champ dramatique baroque : magasin aux accessoires de la colonie française.
Fureur et inquiétude sourde.
Jamais assignée à la moindre leçon d’histoire, son écriture change de registre, se casse, se divertit, au moment où serait tentant de saisir un message, une morale. L’inquiétude fondamentale, le danger de ce vacillement est dans l’invention d’une liberté de traitement du théâtre à partir de l’histoire des formes de cet art.
Mais comme neuf, comme jamais encore essayé.
Drôle de manière de prendre des libertés pour raconter la guerre honteuse de la France. Ainsi, il écrit une pièce historique (la première partie seulement, il meurt avant de pouvoir écrire la suite du triptyque), comme en son temps Shakespeare ou Calderon, sur notre époque de guerre et de paix .
Pas de solution.
La forme des questions travaillées à l’infini pour les interprètes à venir que nous sommes. En attendant que se montrent les histoires au jour de la scène.

Robert Cantarella

06 novembre 2002

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