Tant qu’on peut s’asseoir à une table c’est un jour ordinaire.
S’ils me mettent un pistolet sur la tempe je continuerai à faire la vaisselle comme s’ils n’étaient pas entrés dans la maison.
Comment pourrions-nous vivre autrement ?

Rouge noir et ignorant est le premier volet d’une trilogie Les Pièces de Guerre dont les deux autres parties ont pour titre : La Furie des Nantis et La Grande Paix. Les trois pièces - qui sont conçues autant pour être jouées ensemble que séparément - parlent de la guerre nucléaire, qui, selon Bond, est inévitable d’ici peu si le monde continue dans la voie sur laquelle il s’est engagé.

Il ne s’agit pas seulement avec cette trilogie d’un chapitre de plus à ranger « au rayon des écrits catastrophistes » ; Bond nous y livre une radiographie lucide et vigoureuse de notre société, il dissèque les relations que nous entretenons, en tant qu’individu avec elle, il nous confronte à « l’état des lieux » de nos univers intérieurs, éthiques, moraux, philosophiques et spirituels.

Bien que Rouge noir et ignorant renferme une indéniable noirceur, celle-ci peut et doit être attisée jusqu’à atteindre une dimension grotesque, invitant alors les comédiens à un jeu jubilatoire, truculent et démesuré. Car dans cette histoire de monstre de charbon, mort brûlé par les bombes avant même sa naissance, c’est toute l’imagerie du cinéma d’épouvante dont Bond s’empare pour nous pousser à réfléchir sur notre humanité.

Rouge noir et ignorant comporte de nombreux personnages, mais la pièce sera jouée par seulement trois comédiens. C’est le nombre d’acteurs minimum suggéré par Bond. Le décor quant à lui sera réduit au seul banc évoqué par l’auteur. Cette solution minimaliste suppose un maximum de créativité dans sa réalisation.