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+ d'infos sur le texte de Joël Maillard
mise en scène Joël Maillard

: Ecriture

DEUX ÉCRITURES


La majeure partie du texte est écrite, mais quelques passages sont à inventer oralement, chaque soir.


Dans le texte, les moments d’écriture orale sont un peu comme des didascalies, qui indiquent le sens général de ce que Mona dit, et, parfois, l’impression que devraient laisser ses paroles, ou ce qu’elles produisent en elle. Parfois l’actrice invente la formulation du sens, parfois elle va jusqu’à inventer du sens.


Elle parle donc sur deux modes distincts : avec les mots d’un autre, avec les siens. Ces allersretours entre le construit et le spontané, l’écrit par un autre et l’inventé par soi, créent l’étrangeté formelle propre à ce qu’on pourrait appeler un témoignage-fiction.


CONTEXTE FICTIONNEL


Dans Rien voir le spectateur était immergé dans la fiction, au point d’être spectateur-personnage.


Ici aussi, certes dans une moindre mesure, le spectateur est inclus dans le champ fictionnel. Par la scénographie, le public étant dans le décor, mais aussi par la fonction, car lorsque Mona commence à parler, elle ne s’adresse pas aux spectateurs de la pièce, mais aux gens qui sont venus ce soir à la réunion.


Le cadre de la fiction est donc une réunion, un groupe de parole. Des gens sont réunis pour parler. La première phrase de Mona donne clairement ce code : Bon… je veux bien commencer…


La nature de ce groupe de parole est ce qu’on pourrait appeler une "amicale des artistes sans oeuvres"[1]. On ne vient donc pas dans ces réunions pour témoigner de quelque chose, mais bien pour y présenter des projets non-réalisés.


Ainsi, l’intervention de Mona débute par une lecture de photographies. Puis elle parle d’un projet de rencontres publiques convoquant la naissance et la mort volontaire. Elle évoque encore une liste d’attentats-suicide, ou une série de dystopies destinées à être filmées, mais dont le tournage n’a jamais commencé. Tous ces projets imaginés par Rolf ont en commun leur non-réalisation, et parfois leur non-réalisabilité.


Mais lorsque qu’elle parle du mutisme de Rolf, et du chemin qui l’y a mené, c’est par accident, en ouvrant des parenthèses qu’elle ne parvient pas à refermer, en donnant des précisions qui se transforment en digressions.


Cela dit, son mutisme n’est peut-être pas très loin d’un acte performatif, donc d’une oeuvre…

Notes

[1] Artistes sans oeuvres est le titre d’un ouvrage de Jean-Yves Jouannais, qui fait l’inventaire d’artistes ayant la singularité de n’avoir pas produit, ou montré, d’oeuvres.

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