" Ce qui est intéressant chez Artaud, c’est qu’il est une grande perturbation. Il a en tout cas perturbé la conception naïve des gens de théâtre et, bien sûr aussi, des auteurs qui écrivent pour le théâtre. (...) Artaud n’est jamais parti d’une séparation de la scène et de la salle ; il a tenté de redonner au théâtre une fonction vitale qu’en général il n’a pas. (...) Si je peux faire quelque chose d’Artaud ou si je fais quelque chose qui en est inspiré, alors, en tout état de cause, ce sera comme quelqu’un qui a aussi eu toute confiance en Brecht. Et pour ce qui est de Brecht aujourd’hui, je ne peux plus rien en faire, sauf si je l’appréhende à partir de Shakespeare."

Heiner Müller

" Je m’en suis rendu compte avec Hamlet-machine : après avoir écrit ce texte j’ai eu pour la première fois ... Ce n’était pas la première fois ; la première fois ce fut avec Mauser, je n’avais pas idée de ce que pouvait être une réalisation scénique. Pas la moindre. C’était un texte, et pour ce texte il n’y avait dans mon imagination ni espace, ni scène, ni comédiens, rien. C’était écrit comme dans une zone sourde. Ensuite cela m’est arrivé de plus en plus.
Hamlet-machine c’est pareil : il y a des indications scéniques si désespérées, toutes irréalisables, un symptôme du fait que je ne voyais plus d’espace où cela irait. Ce qui veut dire au fond que ce sont des pièces ou des textes dont mon cerveau, par exemple, ou me tête serait l’unique théâtre. C’est dans le crâne qu’ils seront joués. Comment fait-on cela au théâtre ? C’est le noyau fondamental de la provocation théâtrale d’Artaud qui est à peine une théorie, et qui est devenue, seulement une méthode.
Donc un théâtre de flux cérébraux et de nerfs crâniens."

Heiner Müller