: Où est ma famille
L’écriture (de Marie NDiaye) produit une sorte de film, plus ou moins
transparent, mais qui arrache la réalité à sa tranquille normalité.
Elle crée une distance minimale mais suffisante pour que le monde
nous apparaisse autrement, dans son inquiétante étrangeté, fait
de monceaux de couleurs dont le dessin continue à nous échapper,
comme lorsque nous regardons de trop près une affiche.
Défamiliarisé, le monde se montre dans sa brutale cruauté, une
cruauté mise à nu par la quête insatiable d’une famille où, enfin,
peut-être, nous pourrions nous sentir reconnus et aimés.
(...) L’étrange fatalité qui accable et singularise les héros de Marie NDiaye réside dans cette faculté malheureuse qu’ils ont de ne pas savoir ni pouvoir se fondre dans le flux. Ils vivent douloureusement la résistance subjective qu’ils opposent malgré eux au monde, comme si, précisément, cette seule et incompréhensible barrière, celle d’être encore un sujet moral, leur interdisait d’accéder enfin au Réel, les empêchait d’accepter sans plus de scrupules de devenir amoral du monde.
Dominique Rabaté
Marie NDiaye, Culture France/Éditions Textuel/INA, 2008, p. 23 et p. 27
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