« Nulla è cambiato.
Tranne forse i modi, le cerimonie, le danze.
Il gesto delle mani che proteggono il capo è rimasto però lo stesso.
Il corpo si torce, si dimena e divincola, fiaccato cade, raggomitola le ginocchia, illividisce, si gonfia, sbava e sanguina.
Nulla è cambiato.
Tranne il corso dei fiumi, la linea dei boschi, del litorale, di deserti e ghiacciai.
Tra questi paesaggi l’animula vaga, sparisce, ritorna, si avvicina, si allontana, a se stessa estranea, inafferrabile, ora certa, ora incerta della propria esistenza, mentre il corpo c’è, e c’è, e c’è e non trova riparo. »
Wislawa Szymborska

« Rien n’a changé
Sauf peut être les modes, les cérémonies, les danses
Le geste des mains qui protègent la tête est pourtant resté le même.
Le corps se tord, se démène et se tortille affaibli il tombe, les genoux se recroquevillent Il bleuit, se gonfle, bave et saigne.
Rien n’a changé.
Sauf le cours des fleuves
La ligne des bois, du littoral, des déserts et des glaciers
Entre ces paysages, l’âme vagabonde elle disparaît, revient, s’approche, s’éloigne,elle est étrangère à elle-même, insaisissable parfois certaine, parfois incertaine de sa propre existence tandis que le corps existe, il existe, il existe et il ne trouve pas de refuge. »
Wislawa Szymborska

Nicola a les yeux ouverts mais il ne voit pas. Il vit dans un institut, assisté par deux femmes. Le jeune femme et la femme plus âgée, entre deux prières, le nourrissent, le lave, le rabrouent et le stimulent avec des jouets, en lui lançant des ballons, des balles et un hula hop. Il est assis sur une petite chaise dans un état catatonique depuis qu’il a été arraché, enfant, de chez sa tante, dans le quartier populaire de la Zisa, où il vivait devant un château fabuleux…son enfance, son insouciance sont enfermées dans ce château.. du matin au soir, devant la fenêtre, il passait son temps à compter les diables juchés sur le toit et à défendre le château qui devenait argenté la nuit, avec toutes les petites étoiles qui lui faisaient une couronne. Mais un jour, Nicola, gardien du château, avec le masque de dragon et les gants d’artilleur, a été détrôné. Et il est tombé en extase, pour toujours. Nous le voyons lever les yeux au ciel, émettre un cri, ce cri emprisonné dans son corps, nous l’entendons parler, raconter, s’enflammer avec passion. Ce réveil qui est le nôtre dure le temps d’une allumette.

Emma Dante