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La Tragédie du roi Richard II

mise en scène Jean-Baptiste Sastre

: Entretien avec Jean-Baptiste Sastre

Propos recueillis pour le Festival d’Avignon

Jean-François Perrier – Entre le règne de Richard et l’écriture de la pièce, deux cents ans ont passé mais, visiblement, cette histoire parlait encore au public de Shakespeare. Quand Jean Vilar l’a présentée, il s’intéressait au théâtre comme lieu du pouvoir. Qu’est-ce qui vous pousse aujourd’hui à la mettre en scène ?


Jean-Baptiste Sastre – L’histoire racontée est celle d’un homme qui se « déprend » du pouvoir d’une façon très mystérieuse, abdication ou déposition. Le pouvoir politique, qu’il soit républicain, monarchiste ou autre, existe toujours et le thème de la prise ou de la perte du pouvoir reste un sujet essentiel. Avec Shakespeare, le corps du roi explose et fait exploser son pouvoir. Le roi s’aperçoit alors qu’il n’est qu’un homme, mais qu’il y a en lui « ce souverain qui est en tout homme », selon la phrase de Joseph Beuys. Le pouvoir, dans cette pièce, représente aussi un fantasme pour ceux qui ne l’ont pas, comme pour Henri Bolingbroke, fasciné par le roi Richard. Ce qui se traduit par des joutes verbales où se mêlent agression et séduction. Pour moi, à la fin de la pièce, c’est un homme que l’on tue et pas forcément un roi.


J.-F. P. – Richard est-il un roi qui produit son propre malheur ?


J.-B. S. – Shakespeare s’est inspiré, entre autres sources, des chroniques de Jean Froissart, l’un des plus importants chroniqueurs de l’époque médiévale, dont les écrits ont constitué l’expression majeure de la renaissance chevaleresque dans l’Angleterre et la France du XIVe siècle. Or, dans ces chroniques, le monologue de Richard est plein de douceur et de tendresse, ce qui est un peu différent avec Shakespeare. Avec Froissart, le roi semble dire qu’il n’aurait pas même consommé son mariage avec sa femme et entretient un mystère sur leur relation. Je ne veux d’ailleurs pas avoir à tout expliciter. Je pense que Shakespeare laissait souvent ses pièces à l’abandon et je trouve ça très beau. D’autant qu’elles étaient un peu réécrites par les acteurs. D’après moi, on pourrait établir un parallèle avec la peinture à l’huile, car les pièces sont une matière mobile qui bouge très vite et les personnages aussi.
Quand Frédéric Boyer parle de la résistance du roi dans sa négation, c’est vrai, mais il y a aussi une sorte d’absence totale et complète de résistance du roi. Un curieux mélange donc.


J.-F. P. – Vous parlez beaucoup du langage comme d’une arme…


J.-B. S. – C’est le coeur du théâtre shakespearien.


J.-F. P. – Shakespeare décrit un pays en crise violente. Peut-on établir des parallèles avec notre époque ?


J.-B. S. – Shakespeare a donné au cheval le nom de « Barbarie », ce qui est une pure invention de sa part. Mais je ne crois pas aux parallèles de cette nature, qui cherchent à tout prix une correspondance avec la situation de notre monde contemporain. Le travail se fait autrement.

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