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Bouli redéboule

+ d'infos sur le texte de Fabrice Melquiot
mise en scène Philippe Lagrue

: Entretien

L’invitation faite à Fabrice Melquiot d’écrire la suite de Bouli Miro pour poursuivre avec le Jeune public l’aventure engagée il y a deux ans au Studio-Théâtre, multiplie les Bouli dans la Troupe. À l’heure où vont commencer les répétitions de Bouli redéboule, ils racontent leur rencontre avec le personnage [1].



Aude Gogny-Goubert[2]. Cette saison au Studio-Théâtre de la Comédie-Française sera créée la suite de Bouli Miro, Bouli redéboule de Fabrice Melquiot, avec un changement d’équipe artistique, comment le ressentez-vous?


Guillaume Gallienne. J’avais adoré la première équipe, je la trouvais formidable. Donc pourquoi ne pas continuer ? Ce que Christian Gonon a dégagé de l’univers de Fabrice Melquiot était très juste. Mais cela fait partie des richesses de la Troupe que de pouvoir proposer une lecture nouvelle d’un même auteur. Je trouve que la deuxième pièce est complètement différente, bien que les personnages restent les mêmes. C’est une pièce plus triste avec de l’humour, mais comme mis entre parenthèses. Les personnages grandissent vite. Ils grandissent plus qu’ils ne grossissent, cette fois-ci !


Mathieu Genet. Nous étions tous tellement ancrés dans le premier que cela aurait peut-être été trop tôt pour construire une suite.


Christian Gonon. Même si l’équipe change, un lien s’établit, notamment avec le metteur en scène, Philippe Lagrue, qui était déjà impliqué sur le premier projet, et Alain Lenglet qui reste Daddi Rotondo. Il n’y a pas de sentiment d’appartenance ; nous avons flirté avec Bouli pendant deux saisons, maintenant c’est aux autres de le rencontrer.


A. G.-G. Lors de la première saison de Bouli Miro, Christian a dû reprendre le rôle créé par Mathieu, comment cela s’est-il passé ?


C.G. Mathieu s’étant blessé à la Salle Richelieu en jouant La Forêt, il a fallu réagir très rapidement. En une journée, pendant laquelle je répétais les Fables de La Fontaine avec Bob Wilson, il m’a fallu apprendre le texte pour pouvoir le jouer le soir même. Je pensais ne pas le connaître du tout mais il était dans un coin de ma tête, comme si je l’avais appris inconsciemment pendant le travail de mise en scène.


M.G. Je crois n’avoir pu assister qu’à un filage pour donner deux ou trois indications à Christian. L’ayant sculpté, ce rôle ne lui était pas étranger. Il s’est fondu dedans, ce qui m’a donné l’étrange sensation de passer de l’intérieur à l’extérieur du spectacle en m’y voyant toujours.


C.G. Pendant le travail, nous avions essayé de ne pas tomber dans les clichés de l’enfance.
Chacun avait participé à la construction d’une enfance commune à Bouli et Petula, en donnant des souvenirs, des anecdotes personnelles, en puisant chez ses propres enfants. Les personnages en ont acquis une autonomie, une identité propre faite de bribes d’enfance de chacun des membres de l’équipe, c’est ce qui m’a aidé à entrer plus facilement dans le rôle.


M.G. Lorsque j’ai repris le rôle la saison suivante, j’avais le recul nécessaire pour pouvoir jouer avec les souvenirs que j’en avais et me nourrir de ce qu’avait fait Christian. J’ai pu, par exemple, me rendre compte qu’à certains moments l’énergie que je mettais n’était pas vraiment nécessaire… J’ai pu me détendre et renouveler mon jeu.


A. G.-G. Est-ce que la pratique des reprises de rôles et de l’alternance, si caractéristique de la Comédie-Française, vous a aidés ?


C.G. Nous sommes habitués à nous succéder dans les mêmes rôles et à faire des reprises au pied levé. C’est la force de la Troupe. La saison dernière, j’ai repris en dix jours le rôle d’Hali dans Le Sicilien. C’est un exercice fou. J’étais dans un état tel que je pouvais sereinement aller essayer mon costume, revoir mon texte, puis jouer autre chose le soir. On ne se rend plus compte une fois embarqué dans le moteur de la reprise. En revanche, au bout de la troisième ou de la quatrième représentation, lorsqu’on a réalisé ce qu’on a fait, le trac est deux fois plus fort.


A. G.-G. Dans le cas de Bouli, les choses sont un peu différentes. Guillaume Gallienne, allez-vous jouer le jeu du personnage récurrent en vous nourrissant du premier Bouli ou allez-vous en inventer un autre ?
G.G. Je serais absolument incapable de me nourrir de ce qui a été fait au préalable. Étant donné que le metteur en scène change, ce n’est pas la même proposition. Je vais me nourrir du moment présent avec mes partenaires sous le regard du metteur en scène auquel j’attache énormément d’importance. J’ai du mal à me reposer sur autre chose que sur ce regard-là.


[...]


A. G.-G. Maintenant que Bouli devient un personnage récurrent, que rêveriez-vous qu’il devienne dans un éventuel troisième épisode ?


(un temps, ils rient)
C.G. & M.G. Bouli à la Comédie-Française ! Bouli administrateur ! Bouli président ! Plus sérieusement, il faut poser la question à Fabrice Melquiot, la force du théâtre et de sa poésie tient dans le fait que tout est possible…


G.G. Le deuxième épisode me fait déjà rêver, j’ai envie de le faire, de le faire vivre, de dépasser la tristesse. J’ai déjà mes propres peurs à surmonter, c’est difficile d’imaginer le troisième. C’est à Fabrice de le faire.


A. G.-G. Que souhaitez-vous à Guillaume Gallienne, le nouveau Bouli ?


M.G. & C.G. Nous lui souhaitons qu’il prenne autant de plaisir que nous en avons eu avec ces beaux personnages et ces belles histoires. Bouli, c’est un cadeau, qu’il ait autant de plaisir que nous en l’ouvrant.


G.G. Merci les Bouli !

Notes

[1] L’intégralité de cet entretien paraîtra dans le Journal des trois théâtres n°17, mi-novembre.

[2] Aude Gogny-Goubert est comédienne et a été l’assistante à la mise en scène de Christian Gonon pour Bouli Miro.

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