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Annemarie

+ d'infos sur le texte de René Zahnd
mise en scène Christian Egger

: Soeur, amie, amante

Fascinant destin que celui d’Annemarie Scharzenbach (1908- 1942), morte à 34 ans des suites d’une chute de vélo en Engadine. Poétesse, écrivain, reporter, photographe, archéologue à ses heures, voyageuse au long cours (elle fi t notamment le trajet de Genève à Kaboul en Ford avec Ella Maillart), « ange inconsolable » selon l’expression de Roger Martin du Gard, « ange dévasté » selon celle de Thomas Mann, elle est aujourd’hui, alors que l’on s’apprête à célébrer le centenaire de sa naissance, une véritable icône.


Derrière la légende, c’est pourtant la femme qui m’intéresse : celle qui dans l’énergie de son désespoir a cherché une vie heureuse. Marquée par sa relation d’amour-haine avec une mère despotique, faisant fi gure de brebis galeuse au sein d’une famille fortunée, entravée par ses toxicomanies, atteinte de schizophrénie, elle s’est jetée à corps perdu dans l’existence et dans l’écriture. En quelques années, elle a développé une oeuvre abondante et polymorphe qui traduit le regard lucide, à la fois critique et amoureux, qu’elle porte sur la Suisse en particulier, sur le monde en général.


Au-delà d’Annemarie, c’est évidemment aussi d’une génération qu’il est ici question : génération dorée, génération perdue, représentée dans la pièce par deux brillants trublions, Erika et Klaus, les « enfants terribles » de Thomas Mann, engagés dans un combat sans merci contre le fascisme. Il est étonnant de constater à quel point le questionnement de cette période – les années trente – entre en résonance avec celui du monde contemporain. Comment vivre en un temps de tourmente, alors que les extrémismes gagnent chaque jour du terrain ? Comment, en qualité d’individu, prendre position face à l’Histoire ? Comment conjuguer vie publique et vie privée, dans le jeu confus des relations humaines ? Comment être et rester soi dans l’étau d’une réalité souvent implacable ?


Politique à certains égards, cette pièce se veut aussi poème. Non par le lyrisme de la phrase, mais par son geste d’ensemble : un dessin qui évoque une femme hors du commun et qui, tout à la fois soeur, amie, amante, continue à nous parler, à nous émouvoir, à nous inviter à la réfl exion, parce qu’elle s’affi rme à bien des égards d’une absolue modernité.

René Zahnd

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