« La Nuit des rois » est une comédie mélancolique. Une comédie musicale. Une comédie sur l'amour, sur l'amour de l'amour, le plaisir des souffrances de l'amour. Aimer pour ne pas mourir, jouer pour ne pas mourir. Ivresse de la fête, ivresse de l'alcool, ivresse du trouble, du désir. Ivresse d'être un autre. Toutes les combinaisons de l'amour sont possibles, suggérées. L'amour comme révélateur de ce que nous sommes. L'amour comme réparateur du deuil. Faire revivre les morts par le travestissement, devenir le frère perdu dans la tempête, aimer un homme dans le souvenir du père. Être à la fois homme et femme pour aimer plus encore.

Le naufrage séparation physique des jumeaux. Viola pense qu'elle est la seule survivante du naufrage. Nécessité d'aimer pour continuer à vivre. Ce sera Orsino (son père lui parlait de lui quand elle était enfant). Naufrage et tempête intérieure : être homme et femme pour rencontrer l'être aimé.
Naufrage comme bouleversement intérieur, chamboulement physique, comme le mouvement de la mer qui tour à tour emporte au large et dépose sur le sable. L'océan aurait déshabillé Viola de son apparat de femme pour y déposer un costume d'homme. Devenir un homme pour se connaître un peu plus en tant que femme ? Jouer un autre pour savoir qui nous sommes ?

La musique mélodie des cœurs, des souffrances de l'amour. Complaisance dans la douleur. Complainte. Orsino chante son amour pour Olivia. Musique comme divertissement dans la farce. Dans la nuit. Élément nécessaire à la fête.

Le travestissement comme révélateur de qui nous sommes. Nous sommes constitués de figures masculines et de figures féminines. Nous sommes double, bi, paire, féminin, masculin...
Viola, Cesario, Sébastien ne seraient- ils pas une seule et même personne ?

L'Illyrie, une île suspendue dans l'espace, dans le temps. Île du désir, de l'amour, de la reconstruction. Élément présent : l'eau. Matière présente: le voile. Dans les maisons d' Olivia et d'Orsino ce ne sont pas les murs qui les protègent mais les gens qui les entourent, les écoutent, les plaignent, les portent... Présence très forte du chœur.

Virginie Fouchault