Cet auteur norvégien, quinquagénaire, était un romancier, un poète et un essayiste reconnu et fort d’un œuvre riche d’une vingtaine de titres, (dont des textes pour enfants) quand il a choisi d’écrire pour le théâtre, au début des années 1990. Choix raisonné : il écrit en réaction au théâtre qui se produit.
Sa voix est singulière : il fait voler en éclats la conception habituelle du personnage ainsi que celle de la trame dramatique. Il se tient aux antipodes du théâtre réaliste, cependant il reflète la réalité en ce sens qu’il porte un regard sur les humains, sur la condition humaine, et ce en termes étonnamment concrets mais qui jamais ne ferment la signification.
Ses pièces sont empreintes d’un mysticisme qui se tient en dehors de toute église, marquées par une spiritualité libre, celle du ressenti vécu telle une évidence, au même titre que les ténèbres et la lumière.
Que sait-on des humains ? Que savent-ils d’eux-mêmes ?
Comment et pourquoi vivent-ils, et meurent-ils ?
Dans quel tissu de contingences sont-ils pris ?
Quelle est la liberté du désir et de l’amour ?
Ses pièces invitent à la rencontre de personnages de différentes générations, dans ce que cela charrie de heurts, de demandes et de regards les uns sur les autres divergents. Les générations des parents, des enfants et des petits-enfants se côtoient et se blessent à ne savoir s’aimer, sont blessées dans leur solitude.
Il écrit aujourd’hui, en connaissance des changements de société (quitter la ville pour la campagne, ou l’inverse, travailler et habiter comment et où ?). Des désarrois en découlent qui mènent à une incertitude d’être, à un emprisonnement dans les conditionnements induits. Ou à leur refus.
Jon Fosse s’est imposé à nous par son écriture qui, avec son peu de mots, éclaire avec une lucidité compatissante et caustique, une pudique impudeur, ce à quoi on ne prête pas attention aujourd’hui ou qu’on traite par le dérisoire : l’humain, l’amour et la vie, la mort en étant l’étape ultime.