«Souvent quelque chose m’encombre lorsque j’écris. Je crois que c’est d’être une femme. J’ai l’impression que la mièvrerie me guette à chaque virgule et que le seul chemin pour l’éviter serait la pornographie. Alors j’oscille vaillamment entre l’écriture domestique et l’indécence. Virginia Woolf dit : « Le premier devoir d’une femme écrivain, c’est de tuer l’ange du foyer ». Je n’ai tué personne mais j’ai écrit comme un homme.»
Marie Fourquet, mai 2008

UN JEU MASCULIN LIBERATEUR
Ecrire en empruntant un «je» masculin, c’est le défi que s’est lancé Marie Fourquet dans ce spectacle qui dessine une suite de portraits d’hommes.
« Ces histoires se sont construites peu à peu, chaque texte avait sa mécanique propre tout en étant étroitement lié aux autres. Il y avait quelque chose de très libérateur à écrire au « je » masculin, de très jouissif. Et en même temps, c’est le travail d’écriture qui m’a demandé le plus de rigueur. J’ai bien senti que le moindre faux-pas, la moindre transposition simpliste d’un sentiment féminin au masculin ferait s’effondrer toute la construction de mes personnages.

Ces textes sont nés de cette question très sincère « mais lui, là, maintenant, il en est où ? » Le titre du spectacle Pour l’instant, je doute est une des réponses… Le doute reste très peu viril, il n’est pas rassurant. Les femmes veulent des hommes sensibles et fragiles mais quand même… Alors, qu’en est-il du constat franc de cet état de doute ?

Je pense avoir réussi à faire oublier que ces personnages sont nés d’une plume féminine. Le plus important était de trouver le style, le ton qui leur donnait le droit d’exister sur un plateau de théâtre. »

L’EMANCIPATION MASCULINE
« Cette pièce, Pour l’instant, je doute, est née de l’envie de tracer plusieurs portraits d’hommes, tous confrontés à des situations clés de leur vie, à la pression d’une prise de décision, à un moment où tout peut, pourrait basculer. Ils sont face au point de non-retour, ça les rend fragiles, drôles ou odieux. Ils subissent dans chaque histoire une charge intérieure ou extérieure et ils doivent au moment du récit faire un choix. Ils cherchent la sortie. Il y a, à travers chacun de ces textes, un état de fragilité et d’errance qui est déterminant pour l’interprétation de ces personnages masculins. L’écriture est volontairement plus proche de la nouvelle que du théâtre. Ma volonté était de travailler l’écriture avec le mouvement d’une pensée, d’un soliloque, et d’y insérer grâce aux dialogues, une certaine théâtralité qui bouscule le monologue.

UN ESPRIT ROCK
La musique live est une composante essentielle du spectacle. Elle n’aura pas un rôle d’habillage sonore ou d’une bande son. Le travail et la présence sur scène de deux guitaristes, Ifé Niklaus ( voix et guitare) et Malena Sardi (guitare et son), sont totalement imbriqués à l’écriture. L’univers scénographique, l’éclairage et la mise en scène recherchent une énergie propre au rock.
Pour l’instant, je doute est ainsi construit en une suite de monologues, forme qui rappelle le concert de rock où le groupe laisse tour à tour place à un solo de guitare, au chanteur ou à un solo de batterie. Ici les deux musiciennes travailleront au même niveau que les comédiens. Avec leurs guitares, elles ne sont pas là uniquement pour ponctuer la fin d’un texte, accompagner les voix des comédiens, mais leur présence musicale et physique est pensée comme celle de personnages en interaction totale avec le reste du plateau.

La lumière est elle aussi inspirée de l’énergie rock, c’est-à-dire très influencée par les contres, la saturation de couleurs, les faisceaux dessinés par la fumée propres aux éclairages de concerts. »

Marie Fourquet