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: La Pièce

Sorti des mythologies les plus anciennes, figure ambiguë de l'espièglerie tout autant que de la méchante ruse, petit être incontrôlable, le lutin n'a pas d'âge. Il symbolise, selon la psychanalyse moderne, cette part maudite que l'on nomme l'enfant intérieur. Cependant, ses origines, teintées de paganisme moyen âgeux, sont issues d'un temps où l'homme n'avait pas encore bien défini le concept de néant et où la mort était juste un endroit hypothétique peuplé d'anges de natures différentes, certains démoniaques, d'autres célestes. Mais une troisième catégorie émerge à l'époque de la théorisation du purgatoire : l'ange indécis. Autonome, partisan ni de Dieu ni de Lucifer, son statut passe du mort pénitent au personnage féérique. Une sorte de représentation à la fois primitive, "sympathique" et sophistiquée de l'inexplicable. Dans Oncle Gourdin, on a affaire à un clan de lutins qui ont temporairement élu domicile dans une caverne s'apparentant à un bouge dans un monument patrimonial. Toute la communauté s'active, chacun avec le sentiment d'être utile, attentionné et bienveillant dans un inframonde affreux-merveilleux. Une seule chose les endort : les histoires. Les histoires de Claudel, de Shakespeare, de Genet... Mais ils voient leur routine complètement transformée, quand l'un des leurs découvre la mort. Les lutins se mettent alors à faire des pièces de théâtre, sachant que le théâtre ne commence vraiment que lorsqu'on se retrouve avec un cadavre sur les bras. Ils se permettent de tout jouer, de tout interpréter à leur façon, selon leurs envies, faisant voler en éclats le bon goût, les conventions et les traditions. Enivrés par leur propre jeu, ils se querellent même sur les différentes « options dramaturgiques » possibles. Sophie Perez et Xavier Boussiron cherchent un moyen de faire jaillir le théâtre là où on ne l'attend pas et de le questionner inlassablement. Construisant avec une grande rigueur une déconstruction permanente et jouissive des codes de la représentation, ils circulent au milieu des formes et des écritures les plus classiques pour les faire exploser et tenter de créer ainsi une autre pratique du plateau. Toujours à la recherche d'un lien immédiat avec le public, sensible à un art qui ne se refuse rien, préférant la démesure à l'emphase, la compagnie du Zerep affirme ses influences, de l'opérette à Pina Bausch, du chant grégorien au free-jazz, du cinéma populaire à la caverne de Platon. Les lutins s'activeront donc sans s'économiser pour inventer leur théâtre burlesque, joyeusement insolent et parodique. Un théâtre qui revendique l'humour corrosif comme « seul moyen de rester en vie ».

Jean-François Perrier

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