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Nour

mise en scène Christophe Rulhes

: Les corps et le dispositif au plateau

Acteurs


Le récit est fragmenté dans l’espace et le temps. Les cinq acteurs peuvent jouer tour à tour « Nour », qu’ils soient hommes, femmes, d’origine Occidentale ou Maghrébine. Au plateau, un narrateur joué par un des acteurs et par des textes vidéo-projetés établit les paysages, les contextes, les liens de la chronologie, les étapes significatives de la vie de Nour. Il peut rentrer en rapport direct avec les autres acteurs, en tant que narrateur ou pour jouer un personnage de la vie de Nour. Autour de lui :

  • un acteur/acrobate joue les attachements, la conscience et la capacité réflexive de Nour qui pense, réfléchit, cherche, chute, se relève, tombe, voltige, vole, espère, s’écrase, tombe, se relève. Il pratique les techniques circassiennes (acrobatie, voltige), mais aussi la danse, la musique et le texte.
  • une actrice/danseuse et acrobate joue Nour au présent, en danses, en gestes et en paroles : là aussi, chutes et élans, redressements et contorsions. Elle est d’origine Algéro-Marocaine et peut offrir un tremblement entre la fiction au plateau et la réalité de son parcours. Elle peut témoigner d’une langue transmise ou non dans la famille : l’Arabe ou le Berbère. Elle est un miroir possible de Nour.
  • une actrice/chanteuse quinquagénaire interprète Nour en parlant au passé, avec les airs de la nostalgie et du regret. Elle peut aussi jouer les rôles de la transmission familiale – mère, père, grand-mère – incarner avec « Nour au présent » les rapports intergénérationnels, jouer des personnages connexes à la vie de Nour, professeurs, amies, etc.
  • un musicien, susceptible de ponctuer le récit, d’affirmer une tension ou un climax, une résolution, d’offrir un décor sonore.

Chorégraphie


Une rencontre a lieu au plateau entre le vocabulaire chorégraphique de Julien Cassier au trampoline et au sol (acrobatie, danse) et la gestuelle de Nedjma Benchaïb, acrobate et danseuse de Hip Hop. Les deux corpus de gestes vernaculaires basés sur l’implication dynamique du corps rentrent en résonance. Les corps sont jetés, frappés, mis à l’envers, incarnant les affres d’une biographie menée tambour battant, contrariée, nourrie d’espoirs et de chutes fréquentes. Les chorégraphies sont donc amples et engagées, parfois brutales, souvent obsessionnelles au son d’un ostinato répétitif fabriqué à partir d’un son de voix ou d’instrument. Les danses sont aussi nourries de gestuelles puisées dans le quotidien du corps de Nour, ses tics, ses habitudes corporelles, ses postures, qui peuvent alors composer des chorégraphies moins engagées, suites de gestes orchestrés au fil d’une musique. Techniques au sol, voltige, jeux d’appuis, portés, les accointances évidentes entre les techniques du cirque et celles du Hip Hop sont creusées. Le trampoline est un terrain de jeu commun.


Scénographie, lumière, costumes


Scénographie
Les acteurs évoluent sur un plateau saturé d’un espace plan rouge vinyle, donc réfléchissant, à l’arrière duquel un second espace blanc au sol instable et fragmenté se tient, muni d’un trampoline. L’espace n’est pas sécurisant. Le lieu de l’espace/temps est indéfini. Il souligne l’adversité d’un environnement narratif saturé, contradictoire, dans lequel la personne cherche des attaches solides afin de tenir et de s’affirmer. En fond de scène un écran rigide permet de délimiter l’espace et de projeter des textes et des images qui nourrissent le récit. Le plateau est un lieu/agrès, du trampoline à l’écran rigide aux différents cubes qui forment l’espace blanc, autant de lieux de fuites, de chutes, d’équilibres précaires. Les cubes mobiles sont aussi des socles qui présentent un petit musée de Nour, ses objets et ses photos, ses reliques et ses outils. L’ordinaire de Nour est exposé et magnifié en muséographie.


Lumière
La lumière vient créer des nuances simples et élégantes, contrastant avec les espaces rouges et blancs, créant ainsi des mariages d’aplats et des jeux de réflexion de lumières sur le vinyle et les socles en verre. Elle permet de mettre en valeur la muséographie et sert à isoler des objets en découpes teintées. Le spectateur fera son propre chemin dans ce bain de lumière. Seules quelques scènes particulièrement significatives ou intimistes peuvent être découpées. L’installation lumière s’éloigne d’un plan de feu classique de théâtre pour offrir un objet visuel et plastique constituée d’une géométrie de lampes.


Costumes
Les costumes sont ceux de personnages neutralisés ou contrariés par l’adversité, ils sont rouges et/ou blancs. Bien que parfaitement connotés par leurs coupes, leurs éventuelles marques apparentes et l’utilisation de textiles significatifs (laines, feutres, acryliques), ils sont blanchis ou rougis, de la tête au pied, comme si les personnages ne parvenaient pas à s’affirmer jusqu’au bout, teintés d’une part d’invisibilité, matérialisation métaphorique de la volonté d’être lorsqu’elle est contrariée. Un survêtement de type street-wear, un vêtement d’inspiration traditionnelle, un vêtement fonctionnel : tous neutralisés par le blanc ou le rouge. Qui sont ces étranges personnages dont tout l’index du vêtement affirme une fonction, un métier, une pratique ou une appartenance mais dont les surfaces restent désespéramment neutralisées ? Seuls un ou deux costumes pivots dans le récit peuvent s’afficher pleinement, exubérants et significatifs. Les costumes de l’inculcation de la norme ou de l’accompagnement social (ceux du professeur d’école, du travailleur social), eux aussi, peuvent être parfaitement identiques aux tenues colorées de l’ordinaire. Un travail est mené sur la capuche pour évoquer les arts du camouflage et de la duplicité, les tenues urbaines, mais aussi les couvertures rituelles et culturelles de la tête face au numineux.


Son, musique


L’espace sonore est découpé au plateau avec une façade de salle amoindrie : pas d’effets de concerts, un son narratif au service du propos. On joue sur la stéréophonie et la spatialisation au plateau d’où vient l’essentiel des sons. Les textes peuvent tour à tour être dits a capella ou faiblement amplifiés. L’environnement sonore est constitué de sons concrets et réels enregistrés dans le quotidien de la vie de Nour puis traités, spatialisés, mixés avec des sons numériques, indexés dans une musique mélodico-harmonique le temps d’un récit chanté par les acteurs scandant la narration et profitant de la façade de salle afin de créer un climax. Les sons au lointain sont utilisés fréquemment afin de créer des paysages sonores. Le musicien à vue ne tient pas de rôle théâtral à proprement parler, il active des bandes, des instruments, des images, avec l’idée d’une présence en fosse non matérialisée. Il se promène au plateau. Il chante régulièrement, tel un narrateur qui ponctue les scènes.


Images


La mer Méditerranée, une cage d’immeuble de la cité du Vignaud en Dordogne, un extrait d’entretien avec la grand-mère imaginaire de Nour jouée par une amatrice, ancienne de la Cité des Flamants à Marseille, un texte qui donne à lire une étape réflexive de la vie de Nour tandis que l’acrobate se jette sur le trampoline, un dialogue qui s’affiche tandis que deux corps interagissent en mouvements au plateau… les images sont des outils narratifs simples, nourries par le naturalisme documentaire plus que par l’art vidéo. Elles permettent de compléter la scénographie par un décor animé, une photo, afin de documenter le récit. Les cadres sont fixes ou animés de lents mouvements de caméra pour laisser au public le temps du regard. Quelques montages dynamiques ou plus formels peuvent offrir des prises ou des cadres à l’action au plateau. Les images permettent d’établir un tremblement entre la fiction au plateau et le réel, passé au prisme du cadreur et lié aux enquêtes qui auront été menées pour établir la biographie imaginaire de Nour. Elles invitent donc des témoignages et des acteurs ordinaires.

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