Un matin, Grégor Samsa, voyageur de commerce à la vie bien réglée, se réveille «transformé». Ses sensations, sa vision des choses, sont bouleversées. Son entourage semble effrayé, voire dégoûté, par cette métamorphose physique dont il ne soupçonne pas encore l’importance. Le regard que lui porte sa famille le convainc qu’il est bel et bien devenu monstrueux. Qu’est-il devenu ? En quoi a-t-il muté ? Mais, en raison même de la calamité qui s’abat sur lui, il va rapidement découvrir que les véritables «monstres», d’apparence tout à fait commune et pleinement humaine, sont ceux qui l’entourent et d’abord sa famille.

Allégorique, le chef d’oeuvre de Franz Kafka a beaucoup été commenté et interprété. Sylvain Maurice en livre une version pour la scène très libre, qui reprend les grandes lignes de la nouvelle mais s’émancipe du huis-clos psychologique. Parallèlement à ce qui se joue sur le plateau, des projections vidéo montrent la vision de Grégor Samsa. Pour lui «l’habituel» est déformé, tout a changé de dimensions, les objets comme les rapports humains. Par un principe de caméra subjective, le spectateur plonge avec lui dans le vertige de la réalité tronquée et parcellaire dans laquelle il avait depuis toujours vécu sans se poser de questions. Son regard «neuf» révèle la dimension effroyable et cruelle de sa vie et de ses relations familiales telles que conçues jusqu’ici.

Avec ce spectacle Sylvain Maurice fait le pari que La Métamorphose offre les possibilités d’un théâtre pluriel, décalé et fantastique dont l’humour ne s’absente pas. Un théâtre qui s’ancre à la fois dans la quotidienneté et dans le fantastique pour donner à «toucher l’au-delà du miroir».