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Slums !

+ d'infos sur l'adaptation de Thierry Bedard ,
mise en scène Thierry Bedard

: Dramaturgie

Avec une authentique « grande muraille » de contrôle des frontières high-tech empêchant toute migration massive vers les pays riches, les slums demeurent la seule solution réellement accessible au problème du stockage du surplus de l’humanité de ce siècle. La population des slums croît actuellement au rythme étourdissant de 25 millions de nouveaux résidents par an. Et les nouveaux arrivants sur les franges urbaines sont confrontés à une condition existentielle que l’on ne saurait mieux décrire que comme « une marginalité dans la marginalité », ou, pour reprendre une expression plus violente d’un habitant désespéré d’un bidonville de Bagdad, comme d’une « demi-mort ». De fait, la pauvreté dans un univers humain sordide largement déconnecté des solidarités de subsistances de la campagne et de la vie culturelle et politique de la cité traditionnelle, est le nouveau visage radical de l’inégalité.


Mais les pauvres ne finiront-ils pas par se révolter ?


Les grands bidonvilles ne sont-ils pas tout simplement des endroits prêts à exploser ? Ou est-ce que l’impitoyable concurrence darwnienne – à mesure qu’un nombre toujours plus grand de pauvres continue à se battre pour les mêmes miettes informelles – finira au contraire par donner naissance à une violence communautaire autodestructrice, forme ultime de « l’involution urbaine » ?


Au sein d’une même ville, les habitants des slums peuvent être soumis à une incroyable variété de réaction à la désaffection structurelle et à la privation, qui vont des églises charismatiques aux mouvements sociaux révolutionnaires en passant par les milices ethniques, les gangs de rues, les cultes prophétiques et les ONG néolibérales. Mais si le bidonville planétaire n’est pas un sujet monolithique et ne présente aucune tendance unilatérale, il est néanmoins le lieu d’une myriade d’actes de résistance. De fait l’avenir de la solidarité humaine dépend aujourd’hui du refus militant qu’opposent les urbains pauvres à leur marginalité mortelle dans le capitalisme mondial.


Ce refus peut prendre des formes archaïques aussi bien qu’avant-gardistes : un rejet de la modernité ou une tentative pour en ranimer les promesses étouffées. Nul ne devrait s’étonner que certains jeunes pauvres des banlieues d’Alger, du Caire, de Casablanca ou voir même de Paris adoptent le nihilisme religieux du salafisme dijhadiste et applaudissent au spectacle de la destruction des symboles les plus ostentatoires d’une modernité qui leur est étrangère. Ou que des millions d’autres s’adonnent aux économies urbaines de subsistances des gangs de rues, narcotrafiquants, milices et autres organisations politiques sectaires ... Les rhétoriques de diabolisations des diverses « guerres » internationales – contre le terrorisme, la drogue, la criminalité – ne font que créer un apartheid sémantique : elle dressent des remparts épistémologiques autour des gecekondus, favelas et autres chawls, qui minent toute possibilité de débat honnête sur la question de la violence quotidienne de l’exclusion économique.


Et, comme à l’époque victorienne, la criminalisation radicale des urbains pauvres est une prophétie qui porte en elle-même les germes de son accomplissement, qui prépare de manière certaine un avenir de guerre urbaine incessante …

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