Dans Les Frères Karamazov, comme dans toute la comédie humaine de Dostoïevski, les personnages oscillent toujours entre l’humilité et l’orgueil. Seulement, par un renversement que l’on pourrait qualifier d’évangélique, les plus coupables sont plus près du royaume de Dieu que les plus nobles : “Je suis venu pour sauver ce qui était perdu”.

Grouchenka est “la fille perdue” du roman de Dostoïevski, et c’est à travers elle et par sa voix que nous entendrons l’histoire des Karamazov.

Jeune fille, un homme l’a séduite puis abandonnée pour en épouser une autre, et depuis elle vit dans le souvenir de cette humiliation et le désir d’une vengeance éclatante.

La vie de Grouchenka va être bouleversée lorsque le roman, basculant dans une intrigue policière haletante, révèlera la nature profonde de chacun des personnages.

Découvrant son amour pour Dmitri – le passionné, l’assassin présumé, le parricide – elle se vouera tout entière à sa rédemption .

Elle criera l’innocence de l’homme qu’elle aime, aidera à son évasion et se préparera à partager avec lui une vie d’exil et de contrition.

Ce qui triomphe à travers le renoncement de Grouchenka et en fait dans le roman tout entier, c’est cette vérité, pour Dostoïevski, de l’Evangile : “Celui qui veut sauver sa vie la perdra, mais celui qui donne sa vie (qui fait l’abandon de sa vie), celui-là la rendra vraiment vivante.”