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La Nuit électrique

+ d'infos sur le texte de Mike Kenny traduit par Séverine Magois

: Notes de mise en scène

« Quand j’avais 7 ans, dit Mike Kenny, je passais mon temps à inventer des histoires. Je le fais toujours, sauf que maintenant on me demande de le faire. La principale différence entre aujourd’hui et hier, c’est que les choses me font moins peur. »


« Attention, attention, attachez vos ceintures ! »
Lorsque leur mère part le soir travailler au café, Marie raconte des histoires à François, son petit frère pour l’ « aider » à s’endormir. C’est un moment propice à l’exploration des peurs et des fantasmes. Une visite à la fête foraine ne fera qu’exacerber l’imagination des deux enfants.


« Entrez dans le labyrinthe, le palais des glaces et du rire où l’on se perd pour mieux se retrouver ! ».
La nuit électrique parle de la peur et d’une histoire qu’on raconte pour aider à dormir, celle que raconte la maman pour aider ses enfants à glisser dans le sommeil, celle de la fête foraine que raconte Marie à son petit frère pour le faire soit disant dormir, celle que tous deux se racontent à eux-mêmes quand ils soupçonnent une ogresse d’avoir pris la place de leur mère et celle que le public va échafauder au fil du spectacle avec tous ces récits qui s’entrecroisent.
Avec l’écriture de Kenny, raconter une histoire sur le plateau offre de multiples possibilités car elle se joue des codes de la représentation : les personnages racontent, jouent à raconter, à y croire ou non, explorant de multiples fausses pistes, voies sans issue, comme dans le labyrinthe de glaces de la fête foraine, lieu central du texte. Mike Kenny explore avec délices les allées et venues entre adresses directes au public et illusion théâtrale ; ces va et vient sont caractéristiques de son écriture qui s’amuse ici à tisser, croiser les liens du vrai et du faux, pour le plaisir du spectateur ! C’est ce plaisir du récit, de ce jeu avec les codes qui nous a séduits aussitôt dans ce texte. Il permet tous les possibles de l’imaginaire, de l’incarnation des enfants et ouvre toutes les possibilités pour la scénographie ou le jeu des acteurs.
Comme les enfants qui jouent se donnent des règles et codes pour que tout soit crédible et devienne réel, nous sommes dans un jeu, celui de Marie avec son petit frère, de Maman avec ses enfants, et nos jeunes spectateurs pourront choisir de s’identifier à ce que vivent les enfants sur scène ou de s’en détacher, d’entrer ou de sortir du jeu. Cette possibilité est cruciale puisque ce texte aborde des peurs profondes, intimes, organiques : celle du noir, du sommeil (comme une mort ?), de l’abandon, de la dévoration …
Le traitement que nous avons donc choisi pour l’espace mettra en valeur le dedans et le dehors, l’espace du jeu et celui du récit adressé ; le jeu des lumières permettra aussi de glisser de la réalité vers le fantasme et ses différents « étages », puisque le récit de Kenny, comme les poupées gigognes, nous fait passer d’un lieu à un autre, d’un degré de fantasme à un autre, s’enfonçant de plus en plus profond jusqu’au centre, au noyau dur où naît la peur viscérale.
Les éléments de décor, peu nombreux, seront transformables, glissant aisément de l’intérieur à l’extérieur, du lit au wagon du train-fantôme, de la chambre à la fête foraine, tout cela en partant des mêmes lignes, celles de la petite lampe de chevet à abat-jour, présence rassurante pour un enfant !


« Entrez dans le train-fantôme, venez frémir, crier et rire ! Laissez les bras et les jambes dans les voitures !»
La nuit électrique parle de la peur et du plaisir qu’on a à se faire peur, à éprouver la peur, celle des manèges à la foire, celle des contes écoutés dans son lit, celle qui fait crier de peur dans Le grand 8 et sourire de plaisir quand on la retrouve au fil de son album préféré. Dans ce spectacle nous aimerions jouer aussi des codes de la peur, de son imagerie (celle qui est exploitée par l’esthétique foraine, celle du train-fantôme, élément essentiel à l’intrigue du texte ou celle des contes traditionnels peuplés d’ogres ou d’ogresses, image qui ,ici ,se superpose à l’image maternelle.)
C’est en jouant des lumières colorées, mouvantes et clignotantes comme celles des manèges forains que nous voudrions traduire le texte de Kenny, jouer des peurs du noir et des surprises d’éclats lumineux. Nous aimerions aussi travailler sur les matières offrant des possibilités de reflets, les miroirs déformants pour rendre concrets les mondes imaginaires des enfants.
L’écriture de la lumière et du son va donc permettre l’écriture scénique du texte, soulignant les surprises, les apparitions fantomatiques, les changements de lieu, les coups de théâtre, pour nous permettre de déclencher sursauts et rires (de soulagement) de notre jeune public. Cette écriture se fera parfois en direct et à vue. En scène, mais hors de l’espace de jeu où vont entrer les acteurs, le régisseur, un peu comme un forain active et dirige son manège, pourra déclencher en effet des effets lumineux ou sonores (sirènes, sonneries, rires démoniaques, grincements de porte, quelques mesures d’une mélodie…) pour créer l’histoire ou les espaces racontés par Marie. Elle–même, actrice mais aussi metteur en scène de son récit, pourra s’amuser à déclencher ces effets, soulignant là encore le jeu sur les codes, et permettant à notre jeune public de choisir d’y croire ou non, et d’éprouver le plaisir de se faire peur.


« Allez, allez, roulez ! La direction ne répond pas des objets perdus ou détériorés ! »
Une nuit électrique pour mieux se comprendre et se connaître, jouer et s’amuser de ses peurs, les comprendre et les mettre à distance, aller au cœur du labyrinthe et en ressortir vainqueur !
Une nuit électrique pour jouer à avoir peur, à se faire peur et à en rire !
Une nuit électrique pour explorer les jeux du noir et de la lumière, du dehors et du dedans, du vrai et du faux et donc du théâtre !
« Bonne nuit, dormez bien et faites de beaux rêves », dit Marie à la fin de la pièce en s’adressant au public.


« Il me semble que dans une société saine, l’art devrait servir à examiner ce qu’il y a de plus sérieux dans notre condition d’être humain. Les enfants veulent savoir de quoi il retourne et il me semble que notre devoir est d’interpréter cela, de le révéler, non de le dissimuler. »
Mike Kenny dans un entretien réalisé par l’administrateur de la Comédie de Valence, CDN Drôme Ardèche, mars 2008.

Catherine Le Moullec

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