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La Langue d'Anna

+ d'infos sur le texte de Bernard Noël
mise en scène Charles Tordjman

: Le texte

Une figure monte du fond de l’obscur, monte par un canal qui s’épanche dans la main, comme si le geste d’écrire débondait le courant ténébreux. Un double d’ombre prend muettement la parole. Il ne s’agit pas d’une inspiration, mais bien d’une prise de parole déclenchée par un acte – l’acte de fiction, que j’essaie d’examiner, d’analyser depuis que je le pratique plus régulièrement. En fait, depuis qu’il est devenu pour moi l’écriture… Cela commence avec Le Syndrome de Gramsci, continue avec La Maladie de la chair, et prend à chaque fois la forme de monologue. Un monologue qui, dans La maladie de la chair, repose sur la contrainte de commencer toutes les phrases par «Vous». Le désir m’en est venu de composer une semaine de monologues en utilisant la suite de pronoms personnels, et en considérant que Le Syndrome de Gramsci y tiendra la place du « On ». Je pensais que ce projet resterait un projet, mais d’avril à juillet, j’ai écrit les monologues du « Je » et du « Il ». Le « Je » paraîtra chez P.O.L en février sous le titre de La Langue d’Anna. Le « Il », c’est Mallarmé, seulement désigné ainsi par sa veuve… A chaque fois, cela commence dans le noir, un noir où surgit le mouvement qui forme des phrases guidées chacune par le pronom initial. On dirait que l’acte de fiction, en posant les premiers mots, appelle celui du récit en même temps qu’il le devient. A chaque fois, je suis surpris par la logique du développement, qui progresse imperturbablement, et qui va jusqu’au bout. Je ne connaissais pas la voix qui parle, et je sais qu’après s’être révélée, elle ne reviendra plus. Autrement dit, je ne possèderai jamais ce qu’elle m’apporte, et qui n’aura fait que passer par moi. Il me semble que, toute ma vie, j’ai désiré la forme que réalise le monologue, sans doute parce qu’il rend concordantes sa lecture et l’action qui l’anime en créant une sorte de littéralité entre le récit et sa réception, les deux ne pouvant que s’unir par la plongée dans le même temps, le même lieu, le même acte…


Bernard Noël - 1999
Bernard Noël ou l’éclaircie, entretiens avec Jacques Ancet

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