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Jean la Chance

mise en scène Jean-Louis Hourdin

: La Pièce

Jean La Chance, "Hans Im Glück" est une pièce de jeunesse inachevée de Bertolt Brecht, d’après un conte populaire collecté par les frères Grimm.

Dans le conte des frères Grimm, Jean rentre chez sa mère avec de l'or, pour salaire de sept ans de travail. Il échange au fil de son voyage son or contre un cheval, le cheval contre une vache, la vache contre un cochon, un cochon contre une oie, l'oie contre une meule, qu'il laisse finalement tomber malencontreusement dans un puits.


Tour à tour abusé par d'autres, dépouillé petit à petit de ses biens, Jean rentre chez sa mère cependant heureux : ces échanges inéquitables et abusifs, Jean les considère avec une heureuse naïveté, il en paraît même délesté au sens strict, c'est à dire qu'il en est au final plus léger, libre comme personne.


Ce qu'on lui soustrait n'est pas une perte, mais un allègement, un soulagement.


Celui qui pourrait paraître un homme simple et qui a tout perdu est celui qui gagne le plus dans le conte des frères Grimm : il est délivré de tout fardeau et rentre heureux chez sa mère.


Brecht en s'emparant de ce conte fait aussi de Jean un naïf et un heureux mais il n'y a plus de morale. D'abord parce que Jean échange non plus des biens matériels ou des animaux, mais sa femme, contre une ferme, puis sa ferme contre une charrette, une charrette contre un manège, etc., jusqu'à reprendre même sa femme, et jusqu'à la perdre à nouveau.


Il n'y a pas chez Brecht de hiérarchie de valeur des biens échangés, et cela pose la question : qu'est-­‐ce qu’on est prêt à échanger et contre quoi ? Pour quel bonheur ?


Ensuite, la bonté de Jean et le dépouillement dont il est l'objet ne mènent pas à une résolution idéologique, il y a juste la brutalité joyeuse des échanges, sans souffrance, sans tragique, sans même une fin heureuse, et la pièce se rapproche en ce sens de la farce, elle en reste à la crudité des rapports humains.


Brecht laissant inachevée cette pièce hésite à laisser Jean vivant et nu, ou à le faire mourir seul et abandonné. Dans les deux cas cependant, il reste heureux, et c'est bien le mot allemand "Glück" signifiant à la fois "chance "et "bonheur" (et que l'on pourrait traduire par "veinard" pour entendre les deux sens), qui est finalement le coeur de ce texte.


Il n’a plus qu'un rapport d'échange brut et sans finalité que celle de la jouissance naturelle du monde.

Priscille Cuche

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