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Il Cortile (La Cour)

+ d'infos sur le texte de Spiro Scimone traduit par Jean-Paul Manganaro
mise en scène Valério Binasco

: La Pièce

Cette mystérieuse cour habitée par des personnages rampants qui passent leurs journées, accrochés à un poteau… c’est le lieu des jeux de l’enfance. Où désormais l’on se réfugie pour faire l’amour avec la fille du calendrier, qui a un beau sourire mais pas de nom ; il y a seulement écrit le nom du mois. Ce n’est pas encore interdit. Mais on ne pense pas aux deux « clochards » beckettiens. Vladimir et Estragon sont très loin d’ici, de ce paysage dégradé, en compagnie de Beckett. Nous ne sommes pas à une « fin de partie » avec les survivants de quelque mésaventure apocalyptique. Car le drame même de ces personnages est bien la normalité de leur état, sa plausibilité qui est la plausibilité de ses horreurs. La métaphore est très transparente. Le versant tragique est la continuité de ce monde sans issue, sorti des cardinaux, où l’on est contraint de lutter pour sa survie mais où l’on distribue des dentiers à tout le monde « pour le sourire ». Comme le troisième personnage, sans nom, qui surgit de l’immondice, Nicolas Rigagnese, licencié du jour au lendemain, exactement comme cela était arrivé à son père. Et maintenant à la recherche de moyens pour susciter la pitié, rampant comme un ver dans l’espoir d’obtenir des faveurs.
Sans aucune concession au pathétique ou au sentimental. L’écriture de Scimone a mûri un style reconnaissable, fait de dialogues secs et répétitifs, qu’on retrouve dans le passage de la langue de Messine à l’italien. Et la mise en scène de Valerio Binasco choisit de ne pas dilater la concision du texte, au profit du rythme de l’action immobile. La cour de Scimone et Sframeli ressemble beaucoup à un théâtre, à l’espace de l’expression artistique. Où il est encore possible de parler, s’ils ont des choses à dire. (Autrement c’est mieux de se taire, notait un sage). Et ici entre en jeu la responsabilité de l’artiste. Peppe et Tano jouent, conscients d’être face à un public qui les regarde. A la fin il leur semble avoir « vidé leur sac », mais à y regarder de plus près, il y a encore le noir, le dernier, quand les feux de la rampe se sont éteints, remplacés par une lumière fine qui nous porte hors du théâtre.


Gianni Manzella
IL MANIFESTO 14 septembre 2003

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