Un regard poétique sur l’exil

L’'équipe artistique s’est s’installée au mois d’octobre au Burkina Faso pour travailler. Nous avons constitué là-bas une équipe artistique composée d'acteurs, de chanteurs et de musiciens.

Ce spectacle ne sera pas un spectacle, mais une fable, la fable des voyageurs qui parcourent le monde depuis la nuit des temps. Cette histoire sera celle d’un voyage. Je crois que cette histoire d’exil s’arrêtera dès l’arrivée en France de Lalla, je ne raconterai pas sa vie en France.

Nous travaillerons avec des objets comme s'ils étaient des personnages, et nous demanderons aux acteurs d'être des objets au service du conte. Je vois un spectacle d'images et d'objets. J'entends une histoire racontée par le souffle du vent et le grondement des automobiles. Je sens les parfums, le thé qui frémit sur un brasero...

Synopsis du roman

Lalla est une jeune fille qui a pour ancêtres les hommes bleus du désert. La petite du désert vit dans un bidonville d'une grande cité proche de la mer. Mais le sang des hommes bleus a survécu en Lalla. Elle est constamment hantée par les gestes et histoires qui ont peuplé son enfance.

Lalla est fascinée par l'apparition d'un mystérieux homme bleu, qu'elle nomme le secret. Aussi, la puissance du rêve, de la nature et des légendes l’aident dans cette vie d’exil. Puis son amour pour un jeune berger muet lui fait découvrir son corps. Plus tard son chemin vers Marseille dans un quartier misérable où ses frères immigrés végètent, ne durcit pas son âme lumineuse. Car Lalla a beau travailler dans un hôtel sordide, devenir mannequin grâce à un photographe de mode ébloui par sa beauté, rien n'éteindra au coeur de la jeune femme sa force, son amour de la vie et sa passion du désert. Un jour elle y retourne, seule, en rescapée de l'enfer des hommes.

Une dune de sable fin sous un ciel-tente…

Cela se raconte sur une dune de sable fin, très blanc. Lalla joue dans ce sable fin, joue avec ses doigts, dessine le monde, le monde qu’elle voit, le monde qu’elle rêve.
Derrière il y a un ciel. Un ciel de bidons peut-être. Un ciel-tente de coton, pourquoi pas. Une tente qui peut devenir ciel. Une de ses tentes de Mauritanie où l’on mange et dort au même endroit lorsqu’on est un voyageur de passage. La toile de cette tente peut devenir rouge-toile, ciel-étoilé, lumière écrasante sous le soleil. Je voudrais que ce toit englobe les acteurs et les spectateurs. C’est important. C’est important de partager le même espace.
Dans le sable il y a des trésors pour raconter cette histoire. Il y a des bidons, des bidons-boîtes à trésor. Une bassine d’eau, une ville de bidons jaunes et sales peut jaillir des sables. Je vois des ombres de sable, des ombres qui dansent dans le ciel.

Il faut vraiment que ce spectacle soit une création qui fasse appel aux cinq sens. A l’ouïe : des petits bruits doivent peupler l’espace au-delà des mots du texte. Bruits d’eau, de thé que l’on verse, quitte à les amplifier. L’odorat me semble tout aussi important : l’encens mais aussi les odeurs de cuisson du thé, du bissap doivent être mis en œuvre. Le toucher pourra passer par le contact avec le sable au moins lors de l’entrée du public.
J’aimerais que notre scénographe ait du temps pour inventer des procédés scéniques originaux tels que des machines à vents, marionnettes en ignames ou topinambours. Je continue de voir pour ce spectacle des objets pour raconter les trois contes inclus dans le récit. Thierry Dufourmantelle est prêt à travailler avec nous pour la diffusion-projection en direct d’images sur la toile de la tente-ciel. Pour la traversée du Désert, j’imagine un travail de marionnettes minuscules que l’on pourrait filmer et projeter…

Bruno Thircuir

10 janvier 2007