: Le Projet
Dès son arrivée à Besançon, Sylvain Maurice souhaitait
proposer une programmation qui dépasse
les frontières françaises, en se donnant les
moyens pour que la rencontre entre le public
bisontin et les artistes étrangers soit riche et
féconde. Pour cela, il fallait se donner du temps,
ne pas se contenter d’inclure dans la saison un
ou deux spectacles étrangers faisant un court
arrêt à Besançon entre deux autres villes européennes.
Il fallait inviter des équipes étrangères
à venir créer à Besançon. Et pourquoi pas, poursuivant
l’idée de rencontre, ne pas faire se croiser
sur le plateau des artistes de plusieurs nationalités,
de langues et de cultures différentes ? Faire
naître une utopie de théâtre !
Une expérience parallèle est venue nourrir ce
projet, celle de l’« Atelier permanent » du
Nouveau Théâtre : un groupe d’acteurs travaillant
pendant une semaine avec trois metteurs
en scène différents sur un sujet commun.
Le travail de chacun s’enrichissait de ces croisements,
de ces frottements, pour un résultat qui
nous a semblé enthousiasmant.
C’est ainsi qu’a germé l’idée d’une troupe trinationale,
codirigée par trois metteurs en scène de
pays différents, pour une création en trois
langues qui rende compte de la rencontre des
cultures.
Il fallait trouver des artistes qui acceptent de se
lancer dans cette aventure un peu folle. Les
artistes européens semblaient trop proches culturellement,
pas assez « étrangers ». Deux noms
se sont vite imposés : le japonais Oriza Hirata et
l’iranien Amir Reza Koohestani, dont nous suivions
le travail depuis quelques années déjà.
Oriza Hirata est d’abord connu comme auteur.
Ses pièces ont été mises en scène en France par
Frédéric Fisbach (Tokyo Notes, Gens de Séoul),
Laurent Gutmann (Nouvelles du plateau S, Chants d’adieu), Arnaud Meunier (Gens de Séoul)… Oriza
Hirata est un japonais atypique : il devint célèbre
très jeune pour avoir accompli un tour du monde
à vélo, avant de partir étudier chez les frères
ennemis du Japon : les Coréens. Depuis, il multiplie
les expériences à l’étranger et invite régulièrement
des artistes, notamment français, à venir
travailler dans son théâtre à Tokyo. Le projet du
Nouveau Théâtre ne pouvait qu’attiser sa curiosité
: il a tout de suite accepté d’y prendre part.
Amir Reza Koohestani est un jeune metteur en
scène et auteur iranien dont le travail a été très
tôt remarqué par les festivals européens. Il a
d’abord présenté en France et en Europe Dance on Glasses, Recent Experiences puis a créé au
KunstenFestivaldesArts de Bruxelles Amid the Clouds. Son travail se partage depuis entre l’Iran
et l’Europe. Assez vite, lui aussi s’est montré
sensible au projet bisontin.
Sylvain Maurice se chargeant de la partie française,
l’équipe de metteurs en scène était
réunie. C’était il y a deux ans, fin 2006. Deux ans
pour que les trois metteurs en scène se rencontrent,
débattent du projet, le précisent, réunissent
les comédiens (3 iraniens, 3 japonais, 3
français), l’équipe artistique (scénographe,
créateur lumière, costumière, créateur vidéo,
créateur son), les interprètes, deux ans pour
trouver les indispensables financements. Et pour
s’accorder sur un titre : ce sera finalement Des Utopies ?, non pas parce que le sujet du spectacle
serait l’utopie, mais parce que chaque élément
de ce spectacle est en soi une petite utopie.
Des Utopies ? sera donc un spectacle en deux parties,
auxquelles Sylvain Maurice, hôte des lieux,
ajoutera un prologue et un épilogue.
Oriza Hirata écrit et met en scène la première
partie : Noël à Téhéran. Le soir du 24 décembre,
une petite communauté hétéroclite est réunie
par hasard dans un hôtel d’une station de ski
proche de Téhéran — le propriétaire iranien de
l’hôtel et sa femme, des investisseurs japonais,
des touristes françaises, le directeur et le personnel
de l’hôtel... Puis Amir Reza Koohestani
met en scène les coulisses de la pièce d’Oriza
Hirata, le contre-point de ce qui se joue dans la
première partie. Des coulisses chaotiques, où les
comédiens chuchotent — en quatre langues :
perse, japonais, français, anglais — nous révélant
leurs relations, leurs conflits, exacerbés par
la désagréable impression de jouer devant une
salle vide…
Yann Richard
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