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De quoi tenir jusqu'à l'ombre

+ d'infos sur le texte de Christian Rizzo
mise en scène Christian Rizzo

: Un procédé innovant : l’audiodescription d’un spectacle chorégraphique

La création du spectacle De quoi tenir jusqu’à l’ombre intégrera une tentative inédite d’audiodescription d’une oeuvre chorégraphique, avec le concours de Valérie Castan. Danseuse, elle a travaillé avec de nombreux artistes, parmi lesquels Daniel Larrieu, Antonia Baehr ou encore Mickaël Phelippeau.


Genèse du projet et formation suivie :


« Ma sensibilité et mes questionnements face à la déficience visuelle sont nés en 1994, avec le parcours Dark/Noir à Paris. Cette expérience de déplacement dans l’obscurité totale, dans des situations différentes (rue, square, pente de gravier, bar), guidée par une aveugle, a radicalement transformé ma relation à la perception visuelle depuis mon ressenti de danseuse (équilibre, représentation mentale des volumes, de la perspective, évaluation des distances…).
J’ai, par la suite, participé à des sessions de contact improvisations avec des aveugles avec Didier Silhol à Beaubourg.
En septembre 2009, j’ai découvert l’audiodescription à l’Opéra de Lille, lors de ma participation à l’Opéra Dardanus chorégraphié par Daniel Larrieu. L’audiodescription du spectacle était réalisée par l’association « Accès Culture », prestataire pour l’opéra et le théâtre en France. Si, à ce jour, Accès Culture ne fait pas d’audiodescription de spectacles de danse, il me semblait cependant possible de transposer ce procédé, en l’associant à ma pratique de danseuse, et à mon expérience d’analyse d’oeuvres en danse. »
Valérie Castan


De septembre 2011 à janvier 2012, Valérie Castan suit la formation de « méthodologie d’audio-description pour le cinéma » à l’ESIT – Ecole Supérieure d’Interprètes et de Traducteurs rattachée à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, sous la direction de Maryvonne Simoneau. Dans ce cadre, elle conduit un projet de recherche appliquée en vue d’élaboration d’ « audio-guides », permettant l’accessibilité des spectacles chorégraphiques.


Afin de vérifier la faisabilité de l’audiodescription d’un spectacle chorégraphique avant de poursuivre la recherche, Valérie Castan effectue, avec l’aval bienveillant de Christian Rizzo, un test à l’occasion de la création du Bénéfice du doute, le 20 janvier 2012 à l’Opéra de Lille. Deux déficients visuels sont associés en amont à la préparation de la description. Cette audiodescription est présentée en direct (le commentaire n’était pas enregistré mais dit en live) et des programmes en gros caractères sont distribués.
11 spectateurs déficients visuels acceptent de se prêter à cette expérience, étape de travail importante dans l’adaptation du procédé d’audiodescription à un spectacle chorégraphique.


Très encourageants, les retours de ces spectateurs laissent augurer une suite positive pour le travail de recherche mis en oeuvre. Celui-ci aboutira lors de la création du spectacle De quoi tenir jusqu’à l’ombre, qui sera audiodécrit en janvier 2013.


Une méthodologie de recherche participative


Regarder des corps en mouvement produit un ressenti chez le public, une empathie kinesthésique qui constitue la spécificité des oeuvres chorégraphiques. Il s’agirait donc de décrire, de traduire par des mots, des mouvements et des gestes, afin que le public mal et non voyant accèdent à des sensations, à sa perception et son imaginaire propres du corps dansant.
Autrement dit, la démarche consiste à transmettre l’empathie kinesthésique par la voix et les mots, pour convoquer l’imaginaire. Au-delà d’un compte-rendu des mouvements et des déplacements, il s’agit de transmettre les états du corps et les intentions de la danse, pour toucher la sensibilité du public.
Cela implique un travail de décryptage et de traduction du message de l’image, réalisé à partir de la méthodologie appliquée au cinéma, ceci n’ayant encore jamais été pensé au regard du champ chorégraphique.
L’importance du vocabulaire choisi, de cette nouvelle « grammaire chorégraphique » est un enjeu central pour la compréhension de la traduction par le public mal-voyant ou non-voyant. C’est pourquoi Valérie Castan a décidé d’associer ces spectateurs au processus même d’audiodescription, considérant que le bagage cognitif lié à leur déficience constitue un élément clé de la construction de ce nouveau langage. En cela, la démarche de Valérie Castan est tout à fait singulière dans le paysage de l’audiodescription.


De nouvelles voies ouvertes à la pratique chorégraphique


La collaboration de Valérie Castan avec Christian Rizzo constitue le creuset de la recherche conduite par la descriptrice. L’audiodescription d’un spectacle chorégraphique amène à considérer l’oeuvre comme une image en mouvement. Chez Christian Rizzo, le rapport au mouvement n’est pas seulement lié au corps, il est également lié à l’espace. Les perspectives de traduction du spectacle De quoi tenir jusqu’à l’ombre apparaissent donc très vastes.
En outre, les deux artistes considèrent ce procédé d’audiodescription comme une ouverture susceptible d’enrichir de façon significative le monde de la chorégraphie. Ainsi, ils envisagent de l’autonomiser, à travers la création d’un support : DVD, pièce radiophonique, etc. qui permettrait de participer à une meilleure accessibilité de la danse contemporaine, et de multiplier les entrées pour l’aborder.


« En ce qu’il propose un autre mode de regard, je trouve que le processus de décryptage proposé par Valérie Castan ouvre de nouvelles voies tant pour l’imaginaire que la réalité de la pratique chorégraphique. La description d’une pièce pourrait devenir un objet en soi, une autre approche de la chorégraphie, à condition de restituer objectivement le corps dans son mouvement, son espace et son temps. Amener à deviner le corps si précisément qu’il sera facile de le figurer. Je trouve ce tremplin à l’objectivité de la description et à l’imagination qu’elle ouvre particulièrement réjouissant. D’autre part, j’aime le fait qu’il s’agisse d’une tentative nouvelle. Cela va nous permettre d’être à la recherche d’une syntaxe, d’une façon de travailler commune. L’intérêt réside également dans la participation de non-voyants au processus d’audiodescription, pour faire émerger une traduction qui intègre leur récit. »
Christian Rizzo

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