Écrit en 1978 - français
Présentation
Ben et Gus se trouvent dans un sous-sol, dès le lever de rideau ils nous apparaissent comme deux hommes qui cherchent à tuer le temps, en attendant quelqu’un. La seule chose à faire dans cette situation est de parler, continuellement, inlassablement, flux de parole brusquement interrompu par des silences qui résonnent étrangement. Dialogues plats, répétitifs, dévalorisés… Nous entendons la conversation incohérente, illogique, elliptique de tous les jours, les phrases avec leurs perpétuels retours en arrière, il y a un vide à combler. Alors, comme le dit Anouilh dans Eurydice, «on parle. On a trouvé cela aussi : le bruit de l’air dans la gorge et contre les dents. Deux prisonniers qui tapent contre le mur du fond de leur cellule. Deux prisonniers qui ne se verront jamais.». Gus questionne Ben, qui ne répond pas, pire, il change de conversation. Le langage obsédant devient, dans une tension extrême liée à l’environnement, lieu de dispute : doit-on dire
«allumer la bouilloire» et «faire chauffer le gaz» ou «faire chauffer la bouilloire» et «allumer le gaz» ? Progressivement, comme souvent quand on est deux et seuls, l’un domine l’autre mais cette volonté de domination n’est jamais effrayante à cause du caractère comique de la situation dans laquelle ils se trouvent.