Les spectacles sur Artaud sont généralement construits sur le même modèle : l’incarnation par un acteur des textes d’Artaud, incarnation qui les condamne souvent à ne pouvoir résonner qu’avec quelque chose comme « la folie d’Artaud ». Mais on ne travaille pas sur Artaud. On est forcément sous lui, dans un contrebas désorienté. D’où notre décision d’aborder Artaud, non par l’extérieur, la biographie et la folie, mais par l’intérieur, par le texte et avec nos propres questions. Peut-être que travailler un auteur, c’est, délibérément ou pas, lui adresser une question, c’est toujours arriver vers lui d’ores et déjà avec quelque chose. Notre question était celle du fantôme. Certes les questions de théâtre ne sont pas celles du savoir, elles se doivent d’être confuses. « Au théâtre, comme ailleurs, les idées claires sont des idées mortes », dit Le Théâtre et son double. D’où le parti pris d’entendre Artaud non comme homme ou symbole (folie ou raison écrasée), mais comme partie d’un tout. Partie de la mort, de la mise à mort, d’un certain rapport au corps. Obsessions tournant autour de la masse, du corps politique, de l’histoire. D’où aussi le recours à d’autres pour arriver à lui, autres auteurs, autres natures de texte, autres matériaux. Commencer de lire Artaud, n’est-ce pas sortir d’une logique ontologique ? « C’est qu’au commencement de quoi que ce soit il n’y a pas d’être », dit-il. Diane Scott