Jongleur, manipulateur et magicien, je joue avec des objets entretenant une relation avec eux basée sur la virtuosité, la distanciation et la transformation du réel dans le réel. Le travail qui se construit, établit le personnage et l’univers réel et mental dans lequel il évolue afin de créer un spectacle comprenant plusieurs espaces diégétiques. Ainsi, à la maniére des contes, le spectateur peut découvrir les méandres d’un univers complexe.

L’idée de ce solo est née il y a 4 ans dans les faubourgs de la ville de Stockholm... C’était l’hiver, il faisait froid, un grand manteau noir dépassait d’une poubelle. Je l’enfilais et me redressais imperceptiblement; ma grande carcasse se tenait enfin droite. Je me suis mis alors à faire vivre ce personnage sur scène dans des situations les plus variées possibles de façon à lui trouver ses codes, ses logiques internes, ses rêves et ses cauchemars.

Petit à petit, un univers entier s’est imposé. Un univers fait de vieux objets à la splendeur déchue, récupérés sur le trottoir le soir des encombrants, que certains appellent encore : “Le Soir des Monstres”.

J’ai fabriqué des balles avec un bout de ferraille qui traînait là et mon personnage s’est mis à jouer avec elles, puis avec tout ce qui passait dans ses grands doigts fins. Ainsi, un vulgaire tuyau qu’il agita savamment devint un terrible serpent et l’âme torturée d’une méduse carnivore vint hanter un vieux panier rouillé...

Puis un jour, deux ailes blanches ont poussé sur une des vieilles balles et elle s’est envolée pour ne plus jamais tomber. Le vulgaire tuyau s’est mis à se mouvoir seul et les balles effrayées tentèrent de s’échapper de leurs cages.

La magie est vite devenue une pièce maîtresse dans l’architecture tordue de ce royaume qui parfois se transforme en cathédrale pour quelques instants gracieux. Mais il y a cette maladresse qui lui colle aux os et ces objets qui le défient...

Par la découverte d’un univers, habituer les yeux à s’écarquiller pour qu’ils continuent de briller...

Etienne Saglio