Raconter une autre histoire du théâtre ce serait raconter l’histoire d’un rituel mais aussi d’une pratique celle des acteur.rice.s. Sur scène, quatre jeunes acteur.rice.s exposent avec des moyens simples une histoire, celle de l’art dramatique mais aussi la leur, celle des acteur.rice.s, en rejouant des scènes mythiques documentées grâce à des films, des enregistrements, des récits.
Tenant compte des transformations successives qui affectent l’activité artistique de la création, aussi bien que les métamorphoses du monde, une autre histoire du théâtre s’intéresse à l’évolution des formes et ses hybridations, des avant-gardes historiques à aujourd’hui. Parce que l’histoire du théâtre ne peut se départir de l’histoire des hommes et ce même depuis les années 20…

Ce projet entend refléter les mutations esthétiques que le théâtre a mis en oeuvre au cours de ces dernières décennies. Je veux dans ce projet proposer une expérience singulière du théâtre, un théâtre de la relation qui met en résonance les formes, les gestes et les écritures avec les enjeux politiques et sociaux contemporains.

Faire une pièce pour les jeunes et très jeunes gens car je crois aux vertus de la transmission et du partage et je défends un art du théâtre qui s’appuie sur le regard actif du spectateur.rice, sur sa sensibilité et son intelligence, sans le surplomber quel que soit son âge.

Un art du théâtre sans a priori d’héritages et de sources, avec des artistes qui ré-agencent des univers, pour raconter autrement. Un art du théâtre qui ne se pose plus la question des disciplines. Un art du théâtre avec des artistes qui ont assimilé l’histoire récente de l’hybridation des arts, produisant des histoires et des récits où chacun.e peut trouver sa place.

Je crée des pièces depuis une vingtaine d’années.
J’ai fait le choix du théâtre, persuadée que l’art a des fonctions utiles au développement de l’individu, que la culture est un des piliers du fonctionnement démocratique des sociétés et qu’une oeuvre a le pouvoir de bouleverser une vie.

C’est le dispositif même du théâtre que j’interroge dans mon travail.
Je crée des pièces avec des danseur.se.s et des acteur.rice.s, et je revendique aujourd’hui un théâtre de corps, libre de s’inscrire dans des lieux théâtraux ou non.

Cette volonté de sortir du théâtre et de créer des formes pour d’autres espaces: la galerie, la salle de rock, la bibliothèque, l’amphithéâtre d’université, l’espace public répond d’un souci affirmé de rencontrer l’autre, celui.elle pour qui l’entrée au théâtre ne va pas de soi, celui.elle qui ne s’y sent pas légitime.

Continuer à faire du théâtre mais dans un ailleurs qui engage à repenser les formes que l’on fabrique, à s’interroger sur ceux.elles à qui l’on s’adresse.

Des projets sont aussi conçus pour les boîtes noires, les architectures traditionnelles de théâtre, et s’inscrivent sur des plateaux.
J’ai monté des textes classiques («Minetti» de Thomas Bernhard dans Je suis un metteur en scène japonais, «La lettre de Lord Chandos» de Hofmannsthal pour la pièce Le Groupe) et travaillé des écritures contemporaines. Je collabore depuis plusieurs années avec l’écrivain Pierre Alferi, auteur de trois de mes pièces : Coloc, Répète, Les Grands (textes publiés chez P.O.L.), et j’ai signé l’écriture des pièces Gonzo Conférence, le Choeur. Enfin dans un souci de plus en plus poussé de rencontre, et notamment dans le cadre de ma résidence à la Scène Nationale de Chambéry-Savoie, j’ai réalisé des projets au long cours qui engagent des amateur.rice.s : des adultes, des adolescent.e.s et des enfants (La Bibliothèque, Les Grands et Projet Kids).

Aujourd’hui je veux m’adresser aux jeunes gens en créant une forme pour eux, faire de l’histoire du théâtre une histoire qu’ils peuvent rattacher à la leur.

Fanny De Chaillé