« Voilà les beaux moments de ma vie. Ces rencontres heureuses, imprévues, inattendues, tout à fait fortuites, dues au pur hasard, et d’autant plus chères qu’elles ne sont dues qu’au hasard. »
Jacques Casanova de Seingalt Histoire de ma vie

J’écris tous les matins à la même terrasse de café parisien.
Il y a trois ans de cela, j’écrivais sur l’histoire d’amour de Casanova et d’Henriette, cette mystérieuse aristocrate française que Casanova a rencontrée à Césène. Henriette voyageait habillée en soldat, ils vécurent une histoire d’amour parfaite dans sa brièveté et sa délicatesse.
Alors que j’écrivais, j’avisais à la terrasse de ce café une jeune femme rousse qui lisait. Elle venait là tous les matins. Elle me dit travailler dans la restauration et trouver dans la lecture matinale la consolation, la rêverie propice à ouvrir ses journées.

Nous avons fini par nous retrouver régulièrement à cette même terrasse. Nous fumions des cigarettes, buvions le mauvais café servi là, et colloquions sur le spectacle de la rue, les livres, le passage des saisons, l’amour.

Quand est venu le moment d’échanger nos numéros de téléphones ou des adresses mail, nous avons décidé de nous en tenir à nos adresses postales. Quand nous souhaitions nous retrouver ailleurs que sous l’auvent de ce café, nous nous fixions des rendez-vous par carte postale, au bar du Lutetia, dans un café le long du canal de l’Ourcq, au manège de Petit Pierre dans l’Yonne, dans les tribunes du camp Nou à Barcelone, sur la place Saint-Marc à Venise, à minuit.
Ce jeu devint la matière centrale de mon écriture. Souvent Casanova réclamait ma part d’attention et s’asseyait d’autorité à ma table. Henriette nous rejoignait aussi ainsi que d’autres protagonistes de leur aventure. Les fantômes de Clara et les miens se mêlaient à nos débats.

Dans le spectacle, je ne joue pas le personnage de l’auteur, mais celui de Casanova. Ça m’amuse.

Tu oublieras aussi Henriette est une fantasmagorie qui fait résonner ces rencontres, par l’écriture, mais aussi par la danse et la musique.

Stéphane Olry