Qui aujourd’hui ose critiquer le travail, sa mécanique intrinsèque ? S’offusquer des difficultés voire des asphyxies qu'elle génère ? Comment déjouer la censure morale agissante, rampante et insidieuse et faire émerger un autre récit sur le travail, le non-dit ou le presqu'impossible-à-dire ? De cela, nous avons envie.

Nous initions ce combat avec la pièce « Silence, Travail ! ». Si celle-ci se concentre sur les cols blancs, les winners des centres d'affaires (La Défense, Paris), nous cherchons, à travers le système qu'elle met à jour, à vérifier cette hypothèse : que nous soyons ouvrier, cadre, intérimaire ou autre, nous sommes agis par les mêmes mécanismes de souffrance au travail mais qui se transforment, se travestissent sans cesse pour mieux se dissimuler.

Nous ne cherchons pas ici à faire le procès du travail en tant que tel, mais bien à débusquer cette gangrène de souffrance qui traverse un monde professionnel puis un autre. Montrer les liens, les porosités, les contaminations croisées.

Au travers de «Silence, Travail ! », nous cherchons à disséquer les mondes du travail.

Montrer comment ils peuvent gangréner l’homme.

Donner à voir ces gestes, répétés à l’extrême, à l’absurde, à deux doigts que nous sommes de basculer de l’autre côté, là où l’humain crie en silence.

Donner à entendre cette langue creuse, qui creuse en chacun d’entre nous. Cette langue "faite" d’expressions toutes faites mais qui défait, détruit, déconstruit notre rapport à l’autre. A nous-mêmes.

Qu’à chaque mot, chaque scène, le spectateur s’interroge : « c’est possible ? » et soit pris de vertige.

Mettre à jour la terreur silencieuse qui isole et éloigne.

Osons basculer, se confronter à l’absurde pour - peut-être - ne plus être malades du travail, tout du moins crier, inspirer et sentir que nous faisons toujours partie du monde des vivants.