Sur scène, trois protagonistes (une comédienne, un comédien, une musicienne beatboxeuse) occupent un plateau-chantier. Bidons industriels, plots de chantier, tubes inox de récupération, ruban de signalisation constituent un espace de la construction. Quand Axelle construit sa fusée, son avenir, nous avons, nous, à construire un rapport hommes-femmes plus égalitaire. Au fond, un grillage, fait de fers à béton, est tapissé de panneaux de signalisation renvoyant à l’organisation de notre espace. Ces derniers peuvent devenir supports de jeux ou, une fois retournés, supports d’images vidéos difractées.

Le human beat box bruitiste et percussif crée un espace sonore qui apporte au plateau une énergie puissante. La variété des rythmiques et des sons emmène de la cour de récréation à Cap Canaveral en trois coups de langues et quatre borborygmes. Lexie T, championne de France de la discipline, accompagnée de sa guitare, crée aussi facilement des espaces intersidéraux que des espaces intimes, mêlant l’organique au numérique Cette magie du son, qui ici résonne fort, amène un parti pris d’amplification des voix. Si celle-ci n’est pas systématique, elle est largement utilisée afin de rassembler paroles proférées et sons dans un même espace sonore, visuel et mental.

Le spectacle se déroule sur deux plans qui se croisent et se répondent. D’une part, la fiction. D’autre part, l’interpellation du réel.
Une enfant, « Axelle avec 2L », ne se résigne pas à la place qui lui est assignée et se rêve cosmonaute. Dans cette perspective, quoi de plus logique que de rejoindre le club Apollo, un club de fusées expérimentales où l’on apprend à les fabriquer? Comment croyez-vous qu’a commencé Von Braun, l’inventeur des V2 ? Mais dès cette première étape, Axelle est confrontée à la difficulté de trouver sa place dans un club aussi masculin que n’importe quel club de foot… C’est bien deux ailes et pas moins qu’il lui faut déployer pour prouver qu’une fille aussi peut construire et faire décoller un engin volant, et ainsi gagner le fameux prix Ariane… A l’image du bras de fer entre Russes et Américains dans la course à l’espace, la rivalité entre Axelle et les garçons du club Apollo a bien des allures de guerre froide.

En regard de cette fiction, les trois protagonistes convoquent l’ici et maintenant de ce qui se vit au plateau pour donner corps aux personnages. Une même scène est interprétée, contestée et réinterprétée à la lumière du réel et de l’apport documentaire. Les protagonistes interrogent la fiction en la confrontant à l’interview d’une socio-géographe, à l’entraînement d’une astronaute dans l’espace, à une visite guidée de la station spatiale internationale… Ils convoquent aussi leur propre histoire, leur parcours d’artiste, d’hommes et de femmes d’aujourd’hui. Lexie T, par exemple, vient partager son expérience de femme beat boxeuse dans un univers essentiellement masculin. Cette communauté du plateau s’ouvre aussi à la salle. Au cours du spectacle, sont en effet diffusées des voix enregistrées d’enfants qui disent leur place et celles de leurs parents.

Une cosmonaute est un souci dans la galaxie est un spectacle de l’énergie. Un spectacle qui parle fort, qui bruite, bouge, convoque les corps. Un spectacle qui mêle burlesque et tendresse. Nous voulons voir les enfants s’emplir de cette énergie, se projeter avec enthousiasme et liberté dans leurs désirs. Du souffle !