Ce projet fait suite à une commande de l’auditorium du Louvre qui nous a invité à nous interroger sur la notion de Prophétie.

L’être humain est toujours friand de connaître l’avenir avant qu’il advienne. Il veut savoir ce qui va arriver, pour éviter ce qui arrive. Il veut connaitre à l’avance, ce que Paul Virilio nomme «l’accident»: « L’accident. Tous les accidents, du plus banal au plus tragique, des catastrophes naturelles aux sinistres industriels et scientifiques. L’accident c’est la surprise. L’effet de sidération. Ce qui survient inopinément. Ce qui arrive. » (Paul Virilio pour la Fondation Cartier en 2003)

Pour notre projet, nous avons étudié les écrits de Michel de Nostredame (dit Nostradamus) qui représentent, encore aujourd’hui, la quintessence de la Prophétie. Catastrophe, raz de marée ou apparition de l’antéchrist, rien n’y manque. Après avoir analysé la structure syntaxique de la langue prophétique des Centuries de Nostradamus (une langue volontairement obscure), nous avons pointé le fait qu’il était médecin et qu’il avait obtenu son diplôme à Montpellier quelques années après François Rabelais, auteur lui-même d’une «pantagruélique pronostication» pastichant avec humour les almanachs de l’époque (publications annuelles avec calendrier astronomique, phases de la Lune, durée des jours, éclipses, etc., et divers conseils pratiques). L’oeuvre de Rabelais, contrairement à celle de Nostradamus, nous est apparue comme un modèle d’invention poétique et langagière, annonçant, en quelque sorte, la poésie sonore.

Ainsi est née l’idée de mettre en place une joute oratoire entre deux langages, deux univers, deux hommes issus d’une même époque, mais radicalement opposés. Notre démarche est donc de donner à voir et à entendre cette opposition entre le catastrophisme de l’un et l’humour poétique et sonore de l’autre, sous la forme d’une conférence-performance, sur les traces d’un Walid Raad ou d’un Eric Duyckaerts.