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Patria Grande (Sainte Ungrud des Abattoirs)

mise en scène Dominique Ziegler

: Enjeux dramaturgiques et scéniques

Sur la forme on a affaire à un type d’expression volontairement outrancier qui emprunte autant à la bande dessinée, au cabaret, à la satire politique, au dessin de presse (Willem !) qu’à Brecht et à son emblématique parabole «L’irrésistible ascension d’Arturo Ui», mètre étalon de la fable politico-historique, à la fois référentielle et intemporelle, ainsi qu’à «Sainte Jeanne des Abattoirs», auquel le titre de la pièce fait référence.
La structure se présente sous forme d’une accumulation de vignettes, reflet de la mosaïque que constitue la multiplicité des principaux intervenants et des ramifications et liens que l’on peut faire entre eux. Une telle structure offfre beaucoup de liberté, et permet aussi l’utilisation de passages oniriques ou de flash-back qui contribuent à éclairer la nature des protagonistes ou de faire le lien avec le contexte historique, tout en apportant de bonnes touches de délire.


L’énergie très forte qui se dégage des peuples latino-américains euxmêmes, leur nature explosive et communicatrice, leur vocabulaire parfois coloré, la violence du type d’actions politiques relatées plus haut, permettent l’adoption de ce type d’expression artistique sans trahir la nature de la problématique.Le défi formel absolu de ce projet consiste à trouver le moyen de garder la cohérence dans le flot événementiel, à déceler le fil conducteur dans ce maelström, à raconter le complexe sans perdre en cohésion ni en accessibilité.
Encore une fois, sous un aspect foisonnant et dynamique, c’est bien l’histoire d’un continent en proie à l’avidité depuis un demi millénaire que le spectacle veut évoquer. Ce n’est pas par hasard que la pièce s’ouvre et se referme avec le massacre des Indiens. Un livre, classique, «Les veines ouvertes de l’Amérique latine» de Eduardo Galeano (collection Terre Humaine, édition Plon), constitue un référent historico-politique solide.


Les référents théâtraux majeurs sont Schnitzler et Brecht. Schnitzler, à cause de la construction de son oeuvre « La Ronde », radiographie d’une société particulière à une période donnée, à travers le portrait d’une multitude d’intervenants emblématiques de la société en question.


Brecht, pour sa faculté à s’approprier les problèmes de son temps en présentant des personnages aux points de vues contradictoires, générant une tension dialectique qui assure à la fois l’efficacité du spectacle et la transcription de la complexité du problème traité.
Le nom des protagonistes n’est pas celui des personnages dont ils sont inspirés dans la vraie vie ; de même les noms des pays sont changés.
La musique (Cumbia y Salsa !), très présente dans les rues, les transports, les bistrots et les places publiques de Colombie, rajoute au dynamisme de l’ensemble. Le travail sur le son et les éclairages consiste à restituer la diversité d’ambiances évoquées dans la pièce, des tréfonds de la jungle amazonienne aux différents palais présidentiels ou plateaux de télévisions occidentaux.


Des projections vidéo introduisent pour projeter des éléments tirés du paysage audio-visuel réel, mais qui confinent à la farce et rejoignent involontairement l’aspect farcesque du spectacl. A titre d’exemple, citons des extraits d’un film extraordinairement mauvais avec Arnold Schwarzenegger, dans lequel ce dernier campe un pompier new-yorkais infiltrant la guérilla colombienne pour venger sa famille tuée dans un attentat ( dans un centre commercial aux Etats- Unis !) fomenté par la guérilla en question.
Le vidéo clip, daté des années quatre-vingt, d’une chanson anti-drogue américaine dans lequel apparaît Nancy Reagan, est aussi projeté au moment opportun, pour faire écho au passage de la pièce qui revient sur la complicité entre les services secrets américains trafiquant de la cocaïne pour financer l’achat d’armes à destinations des Contras du Nicaragua sur ordre du mari de Nancy, Ronald !


La scénographie doit évoquer à la fois puissamment tous les lieux et toutes les époques mentionnés, tout en restant très mobile afin de permettre l’enchaînement des scènes. Les matériaux et méthodes artistiques utilisés seront différents d’un univers à l’autres. Certains flashs back comme ceux évoquant le palais de Simon Bolivar seront traités avec des décors rococo volontairement kitsh tandis que le foisonnement végétal de la jungle sera transposé davantage par les effets de lumière où prédomineront la couleur vert sombre ainsi que par des éléments architecturaux à base de bois.
Dans tous les cas, il s’agit d’un défi vertigineux pour le scénographe, dont l’objectif consiste à restituer la diversité de tous ces univers antinomiques afin qu’ils soient lisibles par les spectateurs dans l’immédiat.

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