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Nous n'avons pas vu la nuit tomber

+ d'infos sur le texte de Lola Molina
mise en scène Lélio Plotton

: Notes d'intention

Note de l’autrice. 


Nous n’avons pas vu la nuit tomber saisit les dernières lueurs d’une constellation formée par Jesse, Baba, James, Paul, Christopher et le Type du métro pendant quatre nuits parisiennes à la fin de l’année 1999.
La friction entre écriture du réel et poésie laisse apparaître la liberté et la désobéissance instinctive de la jeunesse. Ils sont les enfants sucrés et paumés de la fin du siècle dernier. Capables d’amour. La subversion est dans leur camp, dès qu’ils brouillent les sentiments, qu’ils troublent les relations, les orientations, les genres. La première partie de la pièce est écrite comme un scénario : des séquences qui s’enchaînent, le début de la nuit Jesse dans son appartement, le métro pour rejoindre Baba, Créteil, un bar. C’est le flow de la soirée qui avance, mais qui s’autorise aussi les détours plus oniriques du flash-back souvenir ou de l’échappée libre vers la chambre d’hôtel qui hante les pensées. Ce sont les échos des rires et des violences qu’ils ont laissés dans les rues que je suis allée chercher. Cette énergie et cette liberté de la jeunesse, j’ai tenté d’en rendre les sensations par une immersion plus que par des explications. Je pense aux scènes de fêtes et de soirées chez Xavier Dolan.


Jesse et Baba sont deux amies qui se prostituent pour payer leurs études. Si l’activité de travailleuse du sexe est claire pour Baba, Jesse semble perdue dans une relation sentimentale mais tarifée avec Christopher. Elles rencontrent un jeune couple : James et Paul, avec qui elles vont nouer une amitié forte et soudaine. Un personnage trouble, le Type du Métro, à la fois harceleur de rue et ange noir semble les poursuivre jusqu’à l’aube alors qu’ils sont réunis au Père Lachaise. Alors que le matin se lève et que le nouveau siècle s’ouvre devant eux, Jesse a un terrible accident.


La pièce bascule alors dans le poème dramatique et nous fait entendre les voix des six personnages éparpillés dans la ville : Jesse perdue dans un coma convoque le souvenir de Christopher. Baba et le Type du Métro errent dans la ville, James et Paul font le rêve de quitter Paris et de faire un enfant.
Je pense à Manque de Sarah Kane dans l’isolement soudain des personnages, dans les voix qui continuent à se faire entendre, à chercher le contact des autres, l’amour peut-être, alors qu’ils sont au bord de la mort ou de l’âge adulte.


Lola Molina.




​Note d’intentions du metteur en scène.


Nous n’avons pas vu la nuit tomber est une pièce sur l’errance et l’amour. La ville est ici le dédale de tous les possibles, c’est un personnage omniscient témoin de toutes les expériences de ces jeunes personnages. C’est le cadre dangereux et électrisant dans lequel les personnages vont s’aimer sans limites de genres ou de contrainte morale. L’espace urbain et nocturne façonne les personnages, il provoque leur énergie et l’intensité de leur désir.
Notre scène est l’espace et le reflet fantasmé de cette ville.


Les six comédiens occupent le plateau et la salle, ils jouent partout. Dans un mouvement organique et haletant, ils nous donnent à voir et à imaginer les bars, le métro, le cimetière. La lumière irisée sculpte les corps au plateau comme autant de réverbères et de lumières tamisées des appartements. Elle est pensée comme un seul mouvement, dans un souffle et permet aux personnages de circuler avec une grande fluidité, sans rupture.


Au lointain, comme pour un concert ou une rave, de grands haut-parleurs impulsent les rythmes et la patine des 90’s. La création musicale fonctionne comme le kick d’une batterie, elle donne le tempo au spectacle, marquant les accélérations et les ralentissements de la fiction. Le début est un quasi scénario, qui glisse progressivement vers le poème dramatique fait d’un tissage des voix. La scène vient peu à peu se ralentir et se figer, la présence musicale s’atténue et laisse place aux voix amplifiées des comédiens. Les corps se désincarnent et laissent place à la polyphonie et à l’épure de la scène. Les personnages deviennent des figures du souvenir, d’avant la nuit. Ils ont vieilli et les comédiens qui les incarnent ont volontairement vingt ans de plus.


Je vois cette mise en scène comme une performance. C’est un spectacle brut et urgent, comme si nous n’étions pas certains de pouvoir le refaire le lendemain.


Lélio Plotton. 

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