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Manque (Crave)

mise en scène Patrick Haggiag

: Présentation

La mémoire est un lieu magique où coexistent jadis et maintenant, l’absence et la proximité, la cause et l’effet, les vivants et les morts. Par elle, les êtres sans ubiquité, sans longévité que nous sommes tiennent ensemble tous les moments tous les lieux, s’élèvent, un instant au-dessus d’eux-mêmes.
Pierre Bergounioux



J’imagine volontiers que le théâtre de Sarah Kane, et plus particulièrement MANQUE, tient pour l’essentiel, dans cette belle phrase de Pierre Bergounioux ; et qu’il faudrait juste laisser se déployer librement, le flux d’une écriture à la musicalité si prenante pour embarquer des femmes et de hommes avec nous. Réceptifs.


On dit souvent parlant du théâtre de Sarah Kane qu’il est exigeant, quand on s’en méfie ou qu’on le redoute. Peut-être saurons- nous faire l’expérience d’un théâtre moins austère ou cérébrale. Manque, pour le renoncement au réalisme et à ses personnages véritables, dans sa forme. Pour le renoncement à l’amour. Chants d’amour douloureux souvent, drolatiques aussi, dans son contenu. Manque, «un véhicule idéal pour la poésie.»
Pensant ce travail, je me souviens d’une interview dans laquelle Sarah Kane parlant de la première mise en scène de Manque disait : «exceptionnellement, cette mise en scène m’a beaucoup plu, si bien que j’ai assisté à une quarantaine de représentations.» Voilà, il s’agit de plaire aussi. Laissé agir le charme poignant, l’envoûtement sans doute.


Puisse ainsi ces quatre personnages, à travers les quatre acteurs (inspirateurs du projet, tout autant que moi, plus peut-être), susciter le voir, et le revoir.


Le flou des personnages et de l‘action, font penser aux pièces radiophoniques de Beckett, mais les personnages de Kane, également des hommes et des femmes qui souvent parlent tout seuls, ont aussi des rapports entre eux, et des sentiments perceptibles, qui touchent le spectateur au plus personnel de sa propre existence.


Il s’agira bien évidemment de déborder du caractère expérimental, qui chez moi n’est jamais une fin, chez Kane non plus, du moins je le suppose, ou l’espère. De développer les fils narratifs, bribes d’histoires, confessions, citations, courts récits, et tirade poignante à l’intérieur d’une même chair d’humanité, et autant que possible, d’intelligibilité.


Comment convaincre de la beauté d’une œuvre alors que j’ignore au fond du fond, ce qui fonde mon élan vers elle, ma fraternité.


J’imagine nos quatre protagonistes dans ces sortes d’espaces publics, gradins de stade, gymnase, amphithéâtre d’université où les générations, les mémoires, les combats de l’existence ont fixé leur empreinte. Où coexistent jadis et maintenant, l’absence et la proximité, la cause et l’effet, les vivants et les morts.

Patrick Haggiag

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