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Trembles

+ d'infos sur l'adaptation de Arlette Desmots ,
d'après Fuglane de Tarjei Vesaas
mise en scène Arlette Desmots

: Note d'intention

J’ai choisi ce titre « Trembles » en référence aux deux cimes de trembles que Mattis aperçoit de sa maison et qui, assimilées à sa soeur et à lui-même, sont surnommées « Mattis-et-Hege » par les gens du village.
Ces trembles, dans l’ambiguïté même de ce mot à double sens, sont emblématiques de la relation entre ces deux êtres.
Je m’intéresse particulièrement au duo que forment ces deux figures : lui, le jeune frère, hanté par l’idée de sa propre mort ou pire encore, par celle de sa soeur, ne sait qu’attendre la prochaine passée de bécasses au-dessus de la maison et ramer sur le lac ; elle, soumise à son sort de soeur protectrice, est animée par la préoccupation constante de subvenir à leurs besoins matériels pour que la vie puisse juste continuer…
C’est la confrontation des entités opposées qu’ils incarnent, qui va tisser la trame dramaturgique de notre travail – le sensible, l’intuitif et le poétique face à la banalité et la matérialité du quotidien.
A travers le prisme du regard et de la pensée de Mattis, inhérent au roman, et préservé dans l’adaptation pour la scène, je souhaite mettre en évidence ces deux visions du monde qui s’entrecroisent, se confrontent pour interroger la fragilité et l’utilité de notre existence.
En mettant en avant ces dissensions, je cherche aussi à souligner la question qu’elles sous-tendent sur ce qui fait le bonheur : qui est le plus heureux ? Le simple d’esprit que tout un chacun voudrait voir se comporter « normalement », ou les sages, les « futés » qui, autour de lui, savent ce qu’il faut faire et dire et comment cela doit être fait et dit pour être dans la norme psychologique ou sociale ?
J’explore une fois encore le champ de l’intime pour y interroger à nouveau l’attention que nous portons chacun à notre vie sensible et émotionnelle. Dans le fracas de nos vies, dans l’agitation de notre société, quelle place pour une meilleure expression de notre moi sensible, intuitif, poétique au service d’une relation « accomplie » à nous-même, à l’autre, au monde ?
Le regard de Mattis sur les choses du monde et les comportements de ceux qui gravitent autour de lui nous amènent à nous interroger sur la part accordée à la poésie, l’art, le silence, l’être, dans cette société du savoir et du faire…
A travers ce texte fascinant, ce jeune garçon se fait le symbole de ces êtres simples qui me sont chers pour les avoir côtoyés de très près au début de ma vie active, ces idiots de tous les villages, souvent regardés avec mépris ou condescendance mais qui savent, souvent mieux que nous, entendre les cris inaudibles des abîmes que nous portons en nous.
Et personne, je crois, ne peut rester indifférent à la puissance de ces cris dont nous cherchons à démultiplier l’impact par notre approche poétique et sensible, au plus proche de l’univers de Vesaas.

Arlette Desmots

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