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Les Chroniques de Peter Sanchidrián

+ d'infos sur le texte de Jose Padilla traduit par Victoria Mariani
lecture dirigée par Véronique Bellegarde

: Retour à la comédie

par Jean-Pierre Thibaudat - Temporairement contemporain N°1

Voici un auteur comme la Mousson d’été les aime : inconnu. Il l’était totalement en France avant que le centre de ressources des écritures qu’est le Panta théâtre à Caen ne commande à Victoria Mariani, la traduction de l’espagnol de la pièce à épisodes de José Padilla Les Chroniques de Peter Sanchidrián. C’était la première pièce que traduisait cette jeune traductrice talentueuse. C’était aussi la première des pièces de Padilla que l’on pouvait lire en français. Alexandra Moreira da Silva qui dirige le domaine étranger aux éditions Les Solitaires intempestifs avait eu Victoria Marina comme étudiante mais ignorait tout de Padilla. Après avoir lu ses Chroniques, elle a tout de suite voulu l’éditer et la proposer au Panta théâtre pour son festival consacré en 2018 aux écritures espagnoles. François Berreur, le directeur des Solitaires intempestifs s’est empressé ensuite de proposer cette pièce à épisodes à Michel Didym. Elle s’est vite retrouvée au programme de la Mousson. Composée de trois épisodes indépendants, la pièce va rythmer le déroulement du festival. Aujourd’hui « Un petit bout », premier épisode de ces chroniques, dimanche le second « Une flamme », et mardi 28 un dernier épisode « 12 voeux ».


Manque un court et savoureux prologue. Je vais me faire un plaisir de vous le raconter. Otto aime Pedro mais ce dernier est « trop bien » pour lui, il préfère le quitter. Pedro n’en tire pas ombrage, il congédie son ami et puis il a autre chose à faire : il doit décoller. À bord non d’un Airbus mais d’une navette spatiale. Pedro dialogue avec C.R.I.S.T.I.N.A. , un super ordinateur qui contrôle « les fonctions vitales du Transporteur Interplanétaire ».


Puis il s’adresse à nous, semble-t-il : « Mais ne soyez pas tristes. Le monde s’achève aujourd’hui, nous le savons et c’est ce qui vous a amenés ici. Bienvenus. Vous êtes arrivé à temps, et vous avez de quoi acheter votre billet vers l’espace extérieur avant que tout ne s’achève. C’est la fin du monde. » Mais là bas quand tout le monde se réveillera après un long voyage, « la fête continuera » car la vie est une fête.


Las, C.H.R.I.S.T.I.N.A. décèle des pannes, irréparables à court terme. La cabine ne décolle pas, il reste moins d’une minute avant la fin du monde. Pedro sort précipitamment de la cabine. Où va-t-il ? À la recherche d’Otto ? On ne sait. On retrouve dans ce prologue bien des éléments qui font la force de l’écriture de José Padilla développée dans les trois épisodes des Chroniques. À commencer par un mélange des genres lesquels, ce faisant, cumulent leurs forces respectives. Après une scène de rupture -motif cher au théâtre depuis la plus haute antiquité-, nous voici plongés dans la science-fiction, d’une réplique l’autre. Ce chassé-croisé entraîne un court-circuit humoristique. On retrouve ce schéma dans le premier épisode des Chroniques « Un petit bout » qui part d’une scène de dépit amoureux et nous conduit dans un monde où l’on ressuscite les morts.


Padilla fait en outre preuve d’un art très nerveux du dialogue n’hésitant pas à emprunter d’efficaces recettes au théâtre de boulevard. Pour lui tous les genres se valent, autant leur faire jouer des castagnettes. Il y a chez lui une liberté d’écriture stupéfiante qui fait penser aux délires de certains films d’Almodovar. Pour José Padilla le théâtre peut tout et peut tout se permettre.


Né aux Canaries, il vit et travaille actuellement à Madrid. Il a reçu plusieurs prix pour ses pièces mais aussi pour son travail de traduction et d’adaptation en particulier de Shakespeare, à ses yeux une pièce comme La Tempête relève de la Science-fiction.


Ce retour à la comédie, cet humour un peu décalé, cette façon de mêler la comédie et la tragédie et de jouer avec les genres chers au cinéma populaire font de José Padilla un auteur intriguant dont on dévorera avec appétit les traductions et d‘abord celles d’autres Chroniques. À suivre.

Jean-Pierre Thibaudat

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