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Le Quatrième mur

+ d'infos sur l'adaptation de Julien Bouffier ,
mise en scène Julien Bouffier

: Présentation

RÉSUMÉ


En 1974, à Paris, Georges, étudiant en histoire, militant activiste pro-palestinien, casseur de facho et féru de théâtre, fait la connaissance de Sam, grec et juif ayant fui la dictature des colonels après l'avoir combattue. Sam a un rêve : monter Antigone d'Anouilh sur la ligne verte qui sépare Beyrouth, avec des acteurs de toutes les nationalités et religions du conflit. Malade, il demande à Georges de le faire à sa place. La troupe se compose d’une palestinienne sunnite, d’un druze, d'un maronite, d'un chiite, d'une catholique, chacun proposant tour à tour une relecture d'Antigone au regard du conflit libanais. Le jeune homme arrive avec sa belle idée de paix, face à des hommes et des femmes qui se haïssent mais acceptent de le suivre dans son projet sans jamais cesser de l’interroger sur ses motivations et sa connaissance de la guerre. Il va devoir composer avec ses engagements, essayer de comprendre ce pays, côtoyer des snipers, être blessé, entrer dans Chatila massacrée… De retour en France, incapable de retrouver sa vie d'avant, il décide de repartir au Liban où il est tué.


INTENTIONS


Théâtre / Docu / fiction ?
Depuis une dizaine d’années, la compagnie a concentré son travail sur la question documentaire dans la représentation théâtrale. Comme le réaffirme Sorj Chalandon, la scène est le lieu de la représentation et donc de la fiction, le quatrième mur la protège du réel. C’est cette frontière que nous voulons emprunter, franchir, faire franchir au public. Rendre perméables nos voyages, basculant du réel à l’imaginaire, de l’image filmée à la scène, de l’acteur au personnage.
Sorj Chalandon construit son récit en déconstruisant la chronologie narrative si bien que le présent de l’action est toujours mouvant. Ce traitement du temps est une des richesses du roman et ses aller-retours temporels offrent un effet de distanciation, d’étrangeté qui stimule une conscientisation du spectateur.
Chalandon pose la question au théâtre de la présence, des fantômes, de l’incarnation à laquelle notre adaptation répond en multipliant les moyens narratifs que nous offre la scène. Entre récit, dialogue, incarnation, théâtre d’objet et cinéma, notre Quatrième mur veut rendre sensible et intelligible ce voyage initiatique entre la vie et la mort, entre incarnation et engagement symbolique.
Le Quatrième mur raconte une histoire libanaise, celle de la guerre, des combats, des enfances broyées. Mais aussi une histoire européenne, celle des mouvements gauchistes étudiants post 68, des résistances, des exils, des injustices, de l'engagement. Cela parle de la construction d’un narrateur toujours en prise avec le politique, le militantisme. Lorsqu'il promet à Samuel de mettre en scène Antigone à Beyrouth à sa place, en pleine guerre du Liban, avec des acteurs de toutes confessions, il s'engage dans un acte doublement symbolique : faire du théâtre avec des combattants réels, pour que, le temps d’un lever de rideau, Beyrouth ne soit pas un théâtre de guerre mais une guerre de théâtre.
Mais la guerre n’est pas symbolique : on tue à Beyrouth. On massacre. Ce massacre n’est pas symbolique. Il est réel. Des êtres vivants ont été méthodiquement assassinés. Que peut faire le théâtre contre la barbarie, ce territoire au-delà des frontières réelles et symboliques ? Que peut-on faire contre la barbarie ?
Sorj Chalandon refuse de répondre à cette question car la représentation d’Antigone n’aura jamais lieu. Le narrateur en revanche, malgré son retour en témoin héroïque, hanté par les fantômes du drame libanais, ne parviendra pas à revenir à la normalité de sa vie française.
Le terrain sur lequel s’inscrit le roman a été foulé par des peuples qui ont été touchés dans leur chair. Sorj Chalandon, alors grand reporter, a été l'un des premiers à entrer dans le camp de Chatila après les massacres. Témoigner, en tant que journaliste, n’a pas suffi pour effacer les images terrifiantes dont il avait été le spectateur. Elles sont devenues son moteur d’écriture pour une fiction. Dans quel but ? Tenter d’expliquer, de comprendre quoi ?


Son choix de se réinventer en metteur en scène pour raconter son histoire m’a incité, comme en miroir, à user encore plus du réel (celui que j’éprouve) pour développer notre spectacle. Extraire les faits et la géographie de son roman, de la fiction. Retrouver dans le Liban d’aujourd’hui les traces de la fiction d’hier, rencontrer et inclure dans notre projet des acteurs libanais traversés dans leur mémoire par la guerre civile. La première partie du spectacle raconte la construction politique du narrateur, son utilisation du théâtre pour exprimer son engagement tandis que la seconde nous emmène en voyage vers l’Autre, vers la recherche d’une confirmation des valeurs qu’il s’est fabriqué pour se défendre du quotidien. C’est ce choc entre engagement symbolique du théâtre et engagement réel de la guerre qui se joue ici et donc plus largement de la difficulté toujours renouvelée pour le théâtre de représenter le monde.

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