Henry Miller écrit "the world of sex" en 1940. Il le révise et le corrige en 1957. Je relis le texte de Miller. Je reste plongé dans un étonnement qui me réconcilie avec le réel.
Impossible de prendre la totalité de ce texte philosophique, spinoziste même nous dit Deleuze.
J'entrevois Une variation...

Un homme d'âge mûr parle à une jeune femme. Lieux.
Une chambre à la Willy Ronis, avec Cherokee de Charlie Parker s'échappant d'un famélique transistor.
Le bureau de travail de l’écrivain, un atelier de peinture, un mas isolé dans sa fraicheur intérieure alors que sa coquille cuit au chant des cigales...

Tour à tour la jeune femme est la journaliste qui vient recueillir les réflexions de ce romancier célèbre, de ce penseur,
l'étudiante qui traque dans sa quête de savoir la vérité que l'expérience et l'écriture apportaient à cet homme avec le temps,
la maitresse brûlante encore de plaisir et de la langueur de l'abandon après l'amour,
l'unique qui confère à la vie le sens qui manquait,
le modèle dont le peintre essaie de saisir ou de magnifier la beauté d'un coup de pinceau...
La putain fatiguée qui partage quelques heures avec un étranger.
Une danseuse, de flamenco ou de tango dansant avec un homme qui pousse sur une roue deux cornes de taureaux à la manière des jeunes matadors qui s'essaient dans la rue en Andalousie.
Cet homme, cet Henry Miller est accoudé à un piano écoutant un crooner jouer et chanter Never let me go...

Quelles que soient les séquences elles attestent d'un temps particuliers, celui de la réflexion créatrice.
De ce tempétueux silence intérieur.
Du temps d'un sourire paisible.
Du temps des amants qui inscrivent leurs caresses clandestines dans l'éternité.

Thierry Atlan