: La pièce de Mauricio Kagel
Le Tribun, intitulé "pour un orateur politique, éclats de fanfares et haut-parleurs" est un monologue. Encore que la pièce nécessiterait 1 acteur (l’orateur) et 8 musiciens. A l’origine, il s’agit d’une pièce radiophonique, écrite en 1979 par Mauricio Kagel, compositeur (1931-2008), où texte et musique avancent "de concert"… La partition musicale (fanfare militaire et enregistrements de foules) et le texte, (un monologue) sont mêlés, se renvoyant ponctuations et contrepoints à la fois dramaturgiques et poétiques.
Le propos monologué
Un orateur tient un meeting à grands renforts de fanfare et d’applaudissements préenregistrés. Il évoque complaisamment les questions d’état et de politique nationale (les frontières, le travail, la religion, la défense, la police…), mais immédiatement on sent que quelque chose ne va pas, que quelque chose est déréglé. De saccades, d’hésitations en brusques dérapages, le discours démagogique, qui s’improvise devant nous avec une rouerie extraordinaire, est délité par la moquerie de Kagel dans un flou idéologique tout calculé : la syntaxe explose comiquement, elle devient étrange et nous révèle peu à peu son vrai message…
Le propos musical
Fanfares, Marches militaires La musique est celle de "10 Märsche um den Sieg zu verfehlen" (10 marches pour rater la victoire) et peut- être aussi interprétée par bande pré-enregistrée. Mauricio Kagel l’a composée pour « Le Tribun » et a indiqué dans le texte les moments où elle doit intervenir. Musique bien de notre temps, qui n’est pas sans évoquer celle de Kurt Weill, elle s’inspire à la fois de marches militaires et des rugueuses et approximatives fanfares de villages d’Amérique du sud. En y introduisant de subtiles ratages, décalages calculés (harmoniques ou rythmiques), tirant le pas triomphateur vers la claudication, la partition de Kagel détourne les démonstrations de puissance et la ferveur des musiques militaires pour la rendre au final très anti militariste. La musique écrite c’est aussi « Foule » : sons d’applaudissements et d’acclamations préenregistrés, que le tribun fait intervenir à l’envie au cours de son discours. Manipulation consensuelle et consentie, auto-galvanisation, démonstration de puissance, le tribun (comme le peuple ?) s’en repait, comme dans les sitcoms télévisuels, c’est un jeu avec le faux des réactions destiné à rassurer et endormir.
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