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Le Bouc


: Le choix du texte

Fassbinder écrit un drame dur et complexe accessible à tous. Cette simplicité me plait et révèle pour moi, cet amour que Fassbinder avait pour les gens et leurs histoires. Il nous décrit une réalité concrète et crée un théâtre d’action qui réveille un sentiment d’urgence. Urgence de questionner ce monde qui s’entretue pour des idées et des croyances. Les concepts et les mots semblent être la seule chose qui nous importe, l’unique richesse que nous possédons et auxquels nous nous accrochons férocement.


Il est possible que nous soyons tous d’accords pour dire que c’est une absurdité de détruire l’autre parce qu’il pense, ressent différemment. Et pourtant je ne suis pas certain que ce sentiment soit général. Les guerres qui se déroulent actuellement dans le monde me montrent le contraire.


C’est toujours l’instinct de survie, l’amour de soi qui nous préserve de l’adversité. Et en soit, c’est tout à fait naturel. Mais il est peut-être temps que l’humanité prenne une pause. Ses prédateurs sont depuis longtemps empaillés dans des musées ou devenus des animaux de cirque. L’humanité n’a plus besoin de s’inventer des boucs émissaires pour justifier ses erreurs, des ennemis pour maintenir sa cohésion. Il est temps qu’elle comprenne que, pour sa survie, que pour l’amour d’elle-même, elle doit collaborer et s’interroger sur tous ces concepts qui la divisent. Accepter le bon comme le mauvais d’elle-même.


Alors peut-être trouvera-elle ce qu’il y a de plus sacré et qui réunit le coeur de chaque être humain.


Mais pour le moment, des millions de ventres sont vides, des milliards de gens souffrent et ont peur. Les richesses appartiennent à une minorité tout aussi effrayée et souffrante que les autres. Des exceptions, heureusement, montrent la voie. J’ai plutôt une vision noire et blanche des choses. J’ai tendance à penser que le gris est une couleur rare et qu’il faut déjà bénéficier d’un certain confort pour y être sensible.


Nous avons encore tant de peine à communiquer sans violence, à accepter l’autre et soi-même dans l’expression de ce que nous sommes, dans nos plus intimes besoins, sans être agressé par ce ressenti. Nous avons encore de la peine à regarder ce vide qui parfois nous habite, sans aussitôt exiger de l’autre qu’il le remplisse, lui donne un sens.


Fassbinder nous montre que la misère économique et affective devient le terreau d’idéologies extrémistes qui conduisent à l’exploitation ou à l’annihilation de l’individu et que la violence naît dans le coeur de chacun lorsqu’il commence à être mécontent de soi. Voilà pourquoi j’aime ce texte, il invite à reconsidérer son proche et soi-même avec un oeil compatissant et généreux. C’est un beau sujet et un bel objet de mise en scène que je désire partager. Et moi aussi, j’ai encore le coeur divisé.

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