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La Vie invisible

+ d'infos sur le texte de Guillaume Poix
mise en scène Lorraine De Sagazan

: Note d’intention

Par Lorraine De Sagazan

Quand Marc Lainé et Claire Roussarie m’ont proposé de faire partie de l’Ensemble artistique de La Comédie de Valence j’ai eu envie d’imaginer un projet avec des habitants de Drôme-Ardèche.


Après avoir écrit des spectacles à partir de grands textes, j’ai eu envie de débuter un nouveau cycle et d’écrire des spectacles à partir des gens et de ce qu’ils me racontaient de leur vie, faisant de la rencontre le centre de mes recherches et de mon intérêt avec une question-guide à chaque œuvre : la fiction peut-elle réparer le réel ?


Avec l’écrivain Guillaume Poix et l’acteur Romain Cottard nous avons donc mené une enquête de plusieurs mois auprès d’un groupe de spectateurs non-voyants et mal-voyants habitués du théâtre. L’expérience du spectateur étant primordiale dans mon travail, leur perception, altérée d’un sens, m’interrogeait.


Les questions se sont portées d’abord sur leur rapport au réel. Qu’est-ce que le réel ? Le réel existe-t-il indépendamment de son observateur ? Que devient le réel avec un sens manquant ? Le réel, tel que l’homme le perçoit avec ou sans les images, n’est- il pas toujours une vision restreinte et « anthropocentrée » du réel dans sa totalité ?


Nous savons que les facultés de l’homme sont trop limitées pour percevoir globalement l’intégralité du réel. Notre intelligence – et donc nos sens – nous permettent d’ordonner le chaos en différenciant les choses. La fiction elle, comme structure limitée et achevée, est saisissable dans sa totalité.


Elle est donc pour moi le meilleur moyen de prendre appui pour percevoir une part plus vaste du réel que je ne pourrais jamais attraper entièrement.


Réel et fiction sont deux pôles que l’on oppose souvent au théâtre. Je crois au contraire qu’ils sont indissociables, se complètent et se nourrissent l’un l’autre. Ainsi pour ce spectacle nous avons recueilli de multiples témoignages sur la vie quotidienne de ces spectateurs mais c’est toujours en évoquant des fictions que la part la plus intime de chacun s’est exprimée.


Thierry nous a fait le récit riche d’une expérience de spectateur qui l’avait fortement bousculé jusqu’à transformer sa vie personnelle mais il ne se souvenait ni du titre, ni du nom des personnages.


Nous avons alors décidé de concentrer notre travail autour de ce souvenir, s’abandonnant à la mémoire et à la perception de Thierry. Mais petit à petit nous nous sommes rendu compte que le spectacle que l’on était en train d’écrire à partir de cette mémoire glissait vers autre chose et que Thierry entreprenait inconsciemment de réparer son histoire.


S’aventurant sur le chemin tortueux de sa mémoire, La Vie invisible se présente donc d’abord comme la reconstitution, à partir de réminiscences lacunaires, d’une pièce inconnue. Mais peut-on jamais être sûr de comprendre, alors que nous avons une appréhension si parcellaire de la réalité ? Peut-on compter sur sa mémoire alors que nous n’avons de cesse de réécrire notre passé ?


C’est cette expérience que nous proposons aux spectateurs de La Vie invisible.


  • Lorraine de Sagazan
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