La Reine des Fous est ma première mise en scène « pour adulte », mais le projet a longuement muri: une dizaine d'année pendant lesquelles je pensais moi-même jouer Camille. Je l'ai prise, je l'ai mâchée, asticotée, abandonnée et reprise. Enfin c'est plutôt elle qui m'a prise et asticotée, sans jamais me quitter...

Quand j'ai eu envie de travailler avec Antoine Cholet, c'était l'évidence de lui proposer ce texte et c'est tout naturellement qu'il a trouvé sa place dans ce projet. Il en fut même le déclencheur.

Camille est née femme, mais on la croit homme, elle est élevée comme tel. Un peu d'Antoine, un peu de moi, et le personnage de Camille a surgi sur la crête entre nos deux univers. Je la dessine et Antoine l'incarne.

Et justement, Camille est sur la crête, entre la vie et la mort. Elle se raconte comme pour conjurer le sort. Son récit est cru, drôle souvent, l'absurdité y est menée à son comble, la cruauté poussée à son paroxysme, l'amour rendu à sa pureté. Le personnage qui se raconte est universel, humain et divin, homme et femme, marionnette et marionnettiste, bourreau et victime, souverain et mendiant, officiant et sacrifié, ignorant et sage. C'est un monstre mythique comme je les aime au théâtre.

Marie-Aline Cresson