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SCENE 1
Bruit de l'avion au parking, puis ambiance du hall de l'aéroport. L'éclairage s'est modifié sur la scène. Moussa est assis, seul et rêveur. Une musique douce et languissante, favorise le voyage du rêveur et le plonge dans les sinuosités du souvenir de son séjour à Paris
Moussa
23 août, cinq heures trente minutes. L'avion se posait avec moi dedans, attaché comme
un bagage. J'ai eu très peur parce ça secouait trop et pourtant tous les passagers ont applaudi.
Je n'y comprends rien ! Pourquoi faut-il applaudir ? Mon voisin (sûrement un voyageur
professionnel) me dit que c'est pour les pilotes qui ont réussi un très bon atterrissage. Bon.
Moi, je n'ai pas pu apprécier parce que j'étais dans mon premier avion... Le premier
atterrissage. Je ne pouvais pas savoir s'il était aussi bon que ça.
L'aéroport à Paris...Je débarque ainsi à l'aéroport de Paris. Ce 23 août restera gravé à
jamais dans ma mémoire. J'étais comme ivre... Avec la tête qui tourne... Comme un mort
ressuscité en plein milieu d'une foule de vivants.
Le premier constat, c'est qu'à Paris, tous les blancs sont blancs et se ressemblent tous.
Impossible d'en reconnaître un dans la foule. Même pas ceux-là qui ont répété avec nous, tout
le mois de juin à Bobo-Dioulasso. Et pourtant je savais qu'ils étaient là, devant nous, à nous
attendre.
Comment pouvions-nous les reconnaître ? Les français, une fois rentrés chez eux,
changent de look. Au Burkina, ils sont court vêtu et en couleur. En France, ils sont sapés
comme des cosmonautes, en gris et noir.
Ah non ! Pas tous. Les policiers sont en bleu. Le contrôle a été plus long que chez
nous. Car ici, chaque policier a son ordinateur à faire manger. Mais heureusement pour nous
c'était spécial : les amis étaient bien là !
« Moussa, eh, Moussa venez par ici ».
Je me demandais qui c'était. J'avançais vers le groupe méfiant et tout à coup brusquement,
je les reconnais. Ce sont les amis du théâtre:
« Hé ! Polo. ..Rémi ... Hé ! Flo...Ouais ! On est là. Mais ce n'est pas vrai... Vous avez
tous grossi ! »
Je m'attendais à ce que nos amis en retour me disent :
« Merci Moussa, mais toi aussi tu as grossi ! »
Mais non. Aïe, ça, ça ne leur plaît pas. J'ai appris plus tard que le français n'aime pas
qu'on lui dise qu'il a grossi. Pour nous c'est le contraire.
Grossir est un bon signe. Cela sous-entend qu'on n'a pas été malheureux durant tout le temps
qu'on ne s'est pas vus.
Chez nous grossir est un signe d'opulence. On dit de quelqu'un qui a grossi, qu'il vit dans le
beurre. Vivre dans le «beurre» veut simplement dire qu'on a les moyens et que chaque jour on
peut faire la bombance.
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