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Histoire(s) de France

+ d'infos sur le texte de Amine Adjina
mise en scène Amine Adjina

: Note d'intention

Histoire(s) de France est né de l’envie simple de continuer à interroger mon rapport à la France, à ce que cela veut dire être français et par là les histoires qu’on nous raconte et qu’on se raconte pour établir un socle commun : notre ou nos histoire(s).
Je suis français d’origine algérienne. Mes deux parents sont algériens. Ils n’ont jamais demandé la nationalité française. Quand j’étais enfant, je suis né à Paris en 1984, je me souviens que les notions d’identité et d’appartenance étaient des notions très floues. Je parlais le français à l’école et l’arabe avec mes parents.
J’allais tous les étés en Algérie à Oran pour passer les vacances avec ma famille. Et j’ai des souvenirs de moi au collège qui me définissait plutôt comme algérien que français, tout en sachant pertinemment que je n’étais pas complètement un algérien. Et on ne manquait pas de me le faire remarquer quand j’allais en Algérie. Là-bas, on nous appelait les immigrés. C’était notre petit surnom : Zimigri.
Pour autant, l’Histoire que je connaissais, que j’apprenais parce qu’elle m’était enseignée, n’était pas l’Histoire de l’Algérie mais bien celle de la France. Le pays où je suis né et dans lequel je vis...
Je me souviens avoir un appétit particulier pour les cours d’Histoire. Je me faisais une fierté de me souvenir des dates et de certains moments de l’histoire de France. J’étais fasciné par les événements... Et ce goût m’est resté pendant toute la durée de mes études. Et encore aujourd’hui...
Pour autant, ma connaissance de l’Histoire s’est toujours faite de façon figée. On apprenait des dates sur une frise et un point de vue sur l’évènement. Mais sans que cela soit présenté comme tel. On apprenait une manière de voir l’histoire. Celle prévue par le programme avec les choses dont on devait absolument parler et les choses dont on ne parlait pas ou peu.


Par exemple je me souviens qu’au lycée, nous avons parlé de la décolonisation mais nous n’avons pas abordé toute l’histoire de la colonisation.
Et ces manques, ces choix produisent des orientations. L’Histoire se raconte aussi par tout ce qui est, volontairement ou involontairement, occulté.


Aujourd’hui, en France et en Europe, nous pouvons voir à quel point, l’Histoire, quand elle est utilisée ou raccourcie, peut servir des causes diverses dont celles de l’extrême-droite. La récupération de la figure de Jeanne d’Arc, ou de celle du Général De Gaulle. Le couronnement de Clovis à la Cathédrale de Reims.
La figure de Napoléon. La formule devenue célèbre : « Nos ancêtres les Gaulois ». Formule qui avait été reprise par Nicolas Sarkozy en son temps...
Or quand on y regarde de plus près, les choses ne sont pas aussi claires qu’il n’y paraît. Tout d’abord, on peut aujourd’hui affirmer qu’il n’y a jamais eu de Gaule mais des Gaules. Les Gaulois n’étaient pas un peuple unifié. Et la romanisation de la Gaule avait déjà commencé avant la célèbre défaite de Vercingétorix à Alésia. Cette romanisation était avant tout culturelle, avant que les choses ne se développent par ailleurs. De plus, les Gaulois qui ont toujours été présentés comme des barbares ; il se pourrait que cette vision ne soit en réalité qu’un mythe. L’archéologie nous apprend dernièrement comment les villages Gaulois étaient structurés. Et ces découvertes font revoir actuellement tout ce qu’on croyait savoir sur ces drôles d’“ancêtres”. Ce que nous savions sur la Guerre des Gaules n’est que la parole de César lui-même. C’est, comme souvent, l’Histoire racontée par les vainqueurs.
De même, Clovis, considéré comme le premier français, était avant tout un germanique. Et il reste peu de chose de la langue des francs dans notre langue qui emprunte plutôt au latin.
Et ainsi, de nombreux exemples permettent de remettre en perspective, de discuter l’Histoire de France.
Notre Histoire. Et c’est un travail minutieux qui est remis en chantier par le travail des historiens. Je citerai ici : Jean-Paul Demoule, Patrick Boucheron, Gérard Noiriel, etc...Ils remettent en questions le rapport fantasmé, essentialiste que nous pouvons avoir avec l’histoire de notre pays.


Pour autant, ce n’est pas un cours d’histoire que je souhaite écrire. Je n’en ai pas les capacités et ce n’est absolument pas ce qui m’intéresse. Non ce qui me guide en premier lieu, c’est l’idée que l’Histoire s’écrit au présent. Comme le théâtre. L’histoire et le théâtre ont ceci en commun, s’emparer du passé pour nous permettre de penser le présent. Ce sont les recherches, les découvertes contemporaines qui permettent de réécrire et repenser certains passages de l’Histoire. De même qu’au théâtre, le travail sur les textes classiques ou les textes contemporains est un travail de réactivation.
Et il me semble que dans ce présent troublé que nous vivons, certaines périodes de l’Histoire peuvent nous permettre de dialoguer, d’avoir un contrepoint pour ouvrir nos façons de faire et de voir. Il s’agit de ne pas laisser l’histoire uniquement à ceux qui l’utilisent à des fins de division.


Pour traiter de cela, j’ai choisi comme territoire de jeu, l’école.
Comme pour Arthur et Ibrahim, l’école aura ici aussi une place centrale. Parce qu’elle a été pour moi à la fois le lieu de l’apprentissage, de la rencontre et du jeu, l’école est au centre de ce que j’imagine pour cette nouvelle histoire.
Mettre le jeu au centre de ce spectacle est une croyance en la possibilité du théâtre. Le jeu est le moyen de l’apprentissage par excellence pour l’enfant. Comme l’imitation. Au théâtre c’est une mise en commun.
Le jeu c’est ce qui nous met ensemble. Et il y a ce désir là. Remettre du commun en interrogeant et en s’amusant avec notre Histoire.
J’imagine qu’Histoire(s) de France pourra être le début d’un cycle d’écriture pour plusieurs pièces à destination de la jeunesse. Dans des formats différents. Pour des lieux différents.
Pour ce premier volet, j’ai choisi de me concentrer sur 3 moments de l’Histoire : les Gaulois, la Révolution Française et la victoire de la France à la Coupe du Monde 98. Avec comme fil conducteur la question du “peuple” pour interroger les origines, le politique, et le commun.


Les cahiers de doléances
Pour ce futur spectacle, la parole des élèves sera prise en compte. Sur le principe des cahiers de doléances, nous viendrons dans les écoles pour des rencontres avec les classes et pour récolter leurs propositions pour une transformation de l’école. Elles seront lues au cours de la représentation dans leurs formes brutes. Pour chaque représentation, ce seront de nouvelles propositions qui seront lues par les acteurs.

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