Avec FoResT nous entrons dans un monde mystérieux, c’est une ballade souvent teintée d’humour et d’une certaine douceur.
C’est du jonglage indéniablement, le regard après 30 années de pratique sur sa discipline dont Jérôme Thomas n’a cessé d’explorer le coeur et les frontières. Un retour vers une pratique de jonglage « pur », mais évidemment qui est tout, sauf conventionnel. FoResT, pièce de maturité et renouvellement, est un espace mental où travailler en haute définition, toucher l’essence de sa pratique. C’est aussi une narration mémorielle de l’artiste qui reconsidère son parcours et questionne le répertoire, guetteur posé au centre de son cirque, épuré. Le choix du chapiteau et du circulaire participe de ce processus.

Nous y rencontrons les balles blanches, fidèles compagnes, avec lesquelles Jérôme Thomas reprend des compositions fondatrices et qui s'imposent aujourd'hui d'une façon presque autonome ; des plumes d’autruche, une plume de paon et leur légèreté, symbole du temps qui passe et se retourne sur lui-même et aussi de simples baguettes chinoises, sorties de leur étui, un sac en plastique… et bien sûr la canne, objet simple, brut, objet qui soutient, qui porte, qui frappe, qui tombe, qui choque. Objet-index qui crée des suspens dangereux et doux.
Dans le cercle de bois du chapiteau, ces objets insignifiants et quotidiens semblent soudain interroger le mystère de l’existence. Du peu, du brut. De l'essence des choses-objets, créer des existences poétiques.

Il y a une condition de l’objet en scène qui fait qu’il n’est pas ce que nous croyons qu’il est. Mon objet « canne », lorsqu’il est en scène, c’est tout sauf une canne. J’aime dire au public, par le biais de mon art : « vous voyez cette canne ? C’est surtout pas une canne ! » Il y a là aussi un rapport poétique à l’objet qui naît du fait que l’objet soit en représentation.

En équilibre :
Jean-François Baëz, accordéoniste et compositeur, partenaire de Jérôme Thomas depuis 2000, l’a rejoint dans ce voyage. C’est la collaboration de ces deux figures comètes du Cirque Lili qui renouvelle au présent la mémoire de l’oeuvre. Les sonorités de l'accordéon se déplient au gré de chaque composition jonglée, de chaque chorégraphie, et la traversée de FoResT est, pour le spectateur, tout autant musicale que visuelle.

Aurélie Varrin, contrepoint féminin, celle sans qui la mise en abîme ne serait pas possible, apporte à la pièce son humour et sa couleur particulière. Sa propre façon de s’approprier l’espace et les objets qui lui ont été transmis.

Manon Harrois, plasticienne, nous a également accompagné dans la création de cet univers singulier qu’est FoResT. Son travail ressurgit sous la forme d’un livret contenant ses dessins, qui accompagne le spectacle.

L’âge et la jeunesse, le masculin et le féminin, FoResT est décidément une pièce d’équilibre.