Brutalité, cruauté et inhumanité sont les termes que m’a directement évoqué le texte de John Ford.

Il en a alors découlé le choix des matériaux à utiliser pour cette scénographie. Des matières brutes et sans travail de finition. Je voulais qu’ils traduisent la violence de cette pièce. La totalité du mobilier est en bois, issue de palettes de transport qui ont la particularité d’avoir un aspect sec et rugueux. Les accessoires se montent et se démontent au fil de la pièce et les comédiens peuvent ainsi composer ou décomposer leur espace. Un fond de scène est constitué de lais translucides tombant du grill, où les comédiens peuvent se cacher, apparaître ou disparaître ; toujours en mouvement, ce fond de scène réagit constamment au passage des comédiens car composé de toile en PVC (symbolisant la férocité des personnages masculins) et de voilages (représentant la naïveté et la douceur d’Annabella).

L’ensemble de la scénographie est volontairement clair afin de prendre de façon optimal la lumière, mais également la vidéo. En effet les ambiances et l’argument sont renforcés par des séquences de vidéoprojection soulignant les émotions et les tensions. Ces projections sont pour la plupart des éléments naturels captés en milieu naturel, toujours dans une logique de matière première. La palette couleur, plutôt dans une dynamique naturaliste au début, vire progressivement vers des teintes plus violentes : le rouge (la violence et la passion), le vert (le macabre et la mort). Ces projections recouvrent les acteurs et et complètent la lumière en créant des effets de substances et de vibrations sur les corps, les costumes et la scénographie, de façon à unifier l’ensemble des séquences.

Edouard Trichet-Lespagnol